MÉDITATION
Qui, le 21 mai, saura la raison de son jour férié ? Certes, toi, lecteur tu le sais, mais tes voisins ? Le plus cultivé d'entre eux n'ira-t-il pas confondre avec l'Assomption (élévation de Marie à date fixe, le 15 août) ? Ou, pourquoi pas, avec Pentecôte ?
Tous ces mots, qui peu à peu s'effacent des territoires mentaux de nos contemporains. L'idée géniale du christianisme : parsemer de fêtes les jours des gens semble désormais une idée épuisée.
Combien ?
Et combien d'Églises protestantes, les années sans virus, fêtent-elles l'Ascension ? A quoi bon d'ailleurs ? Le dernier paragraphe de ce petit article sera là pour en dire le bon.
Quoi ?
L'ascension est d'abord le mot de la tradition chrétienne qui désigne l'événement - dont on pourrait sans fin discuter de l'historicité - de Jésus s’élevant au "ciel" et laissant ses disciples à terre. Marc raconte cela très sobrement (un verset, le 19 du chapitre 16). L'auteur de l'évangile de Luc parle de disciples qui restent avec une grande joie (Luc 24, 50-53). Quant à l'auteur des Actes (dont on dit qu'il est le même que celui de l'évangile de Luc) il décrit des disciples qui restent pantois: "pourquoi restez vous là scruter le ciel ?" leur disent deux hommes en blanc (Actes, chapitre 1,11).
Combien ?
Combien de prédications ont-elles été inspirées par cette petite phrase, pour tenter de convaincre le peuple de s'attarder plutôt aux choses et aux gens de la terre et de profiter des joies de l'horizontalité (ai-je déjà entendu).
Quantique ?
Un catéchumène narquois, à qui on voudrait expliquer les origines bibliques de cette fête - narquois mais intelligent - ne manquerait pas de poser la question qui fâche le fondamentaliste : à quel moment Jésus passe-t-il du ciel diurne - le nôtre, celui dont l'ozone donne sa couleur bleue- aux cieux (où il s'assit à la droite de Dieu, dit tout de même Marc dans son sobre verset) ?
Mais je pense qu'il se répondrait à lui-même par l'hypothèse d'une porte quantique, mobilier si fréquent dans la littérature qu'il connaît. Ce qui justifierait d'ailleurs que les disciples ne voient plus rien, malgré leur scrutation.
Apothéose ?
Un autre catéchumène, cette fois plutôt adulte et plus ouvert à la culture classique n'expliquerait rien mais raconterait les nombreux cas d'élévations de personnages sacrés : Moïse, Hénoch pour la Bible, ou Isaïe (apocryphe) et pour le reste Romulus, Hercule.... Il évoquerait ainsi, comme pour Hercule, la notion d'apothéose (devenir Dieu). Cette dernière hypothèse ne collant d'ailleurs pas avec la théologie générale des évangiles synoptiques et des Actes.
A quoi bon ?
Ce qui est bon dans cette fête, c'est tout simplement que Jésus est parti ! Que les élèves du maîtres soient désormais
les porteurs de la Parole. Jésus ne parle plus mais c'est nous. Aidés, comme le raconte Actes, de l'Esprit Saint (et non pas de l'esprit de Jésus, qui ne soufflerait donc pas aux oreilles de ces anciens élèves (disciples) devenant envoyés (apôtres).
L'ascension - mot qui ne dit rien - deviendrait la fête de la responsabilité. Ce serait donc une fête plutôt protestante !
Il serait grand temps que nous la redécouvrions et qu'avec amour, nous la cultivions.