MANIFESTE
C'est bien le nom du projet central de l'Église Protestante Unie de Port Royal Quartier Latin, située en plein Paris.
Pourquoi ce nom? Sans doute à cause de son origine. Un manifeste, au 19 e siècle était un écrit visant à faire connaître des idées nouvelles et spécialement en art. "Manifestatio" désignait au 12e, en latin chrétien la révélation divine. Et de fil en aiguille, un manifeste (mani: main) est ce qui prétend rendre palpable ce qui est caché, obscur.
L'Église Protestante Unie de Port Royal Quartier Latin invente ce projet en observant ce qu'elle est: le résultat, depuis 2006, d'une fusion entre une église protestante classique (église réformée de Port Royal) et une église réorientée dans les années 80 vers l'art (église réformée de la Maison Fraternelle). La Maison Fraternelle, qui existe depuis 1910, est aujourd'hui un espace de 500 mètres carrés, au coeur du quartier latin, avec une scène, une régie, des cimaises partout, une cuisine, plus un jardin de 500 m2. Le Temple de Port Royal, fondé en 1898, est un lieu de 150 places, à l'architecture néo byzantine, avec des orgues, un piano, des mosaïques et une excellente acoustique pour la musique.
À partir de l'observation de ce qu'elle était devenue, elle s'est mise à observer ce qu'elle faisait.
- Des cultes, évidemment.
Un regard plus attentif sur cette pratique nous a conduit à l'évidence: un culte est une synthèse vivante de disciplines artistiques : l'art de la prédication (revendiqué comme tel, ici) , la musique, assurément, et son répertoire constitué par quelques uns de plus grands artistes comme Bach et Clément Marot, l'architecture (ce qu'elle inspire), la poétique (qu'est-ce qu'un texte, sinon une productivité), la chorégraphie parfois, le théâtre en maintes occasions.
Peu à peu, autour de ce culte s'est constituée une envie d'excellence dans ces disciplines: l'art de la prédication mais aussi de le lecture travaillée, certes, mais aussi un appel systématique à des musiciens professionnels et inspirés, la présence de tableaux offerts par des artistes (dont une représentation de l'arbre de vie crée par une artiste venue des Beaux Arts de Paris), l'inclusion de moments proprement théâtraux par des comédiens professionnels. Le culte : une représentation sans spectateurs dans la mesure où tout le monde y collabore, y compris la présence divine pour les croyants.
Le culte: la manifestation symbolique et réelle d'une communion beaucoup plus large que la communauté présente transforme en un appel universel.
- Toute la vie d'une église, avec un regard particulier qui accueille, soutient, forme des personnes au-delà d'une quelconque carte d'identité spirituelle, mais dans l'action, militante et aussi réflexive au cours d'assemblées générales thématiques régulières, et même dans l'action de prier ensemble.
- Un accueil assez exceptionnel de nombreuses personnes, groupes et associations artistiques . Des ensembles vocaux qui sont devenus des partenaires réguliers, bien que non protestants dans leurs composition et leur projet, des ateliers de théâtres pour enfants et adultes, une troupe de théâtre humanitaire, créée par l'Église, composée de jeunes et de jeunes adultes, des événements d'expositions fréquents sur le site de "La Maison Fraternelle", grâce entre autres, à des "contrats" réalisés avec des associations des arts déco et des beaux arts de Paris, une association de cinéphiles.
Notre église, en offrant ses locaux pour le temps d'une exposition portée par des jeunes artistes généralement issus des grandes écoles d'art fait fonction, discrètement, de mécène
Récemment, notre Église a fondé le " Choeur du Temple de Port Royal", qui est devenu rapidement notre représentant musical, avec non seulement ses concerts basés sur le répertoire protestant, incluant des amateurs en formation et des artistes professionnels, mais qui devient aussi "une école de musique protestante", ce qui n'existe nulle part ailleurs en France. Ce Choeur du Temple devient donc un partenaire privilégié du projet.
Toute cette profusion,
il a d'abord fallu la nommer, et ensuite la penser comme un projet singulier. Il ne s'agit pas ici d'une église ayant un affichage culturel. De nombreuses églises "font" des concerts, voire des expos (essentiellement thématiques), mais peu décident de mettre l'art au coeur de leur projet.
Ce projet se situe à la frontière des vocations.
Sur cette frontière, la bonne nouvelle est transmise de façon réciproque, entre des membres officiels d'une église responsable d'une bonne nouvelle pour le monde, et des artistes qui peuvent en dévoiler des pans de sa réalité profonde. Sur cette frontière-là, il n'y a plus de "dedans" et de "dehors", il n'existe qu'une rencontre qui porte du fruit.
Ce projet singulier est pour nous un espoir pour une Église d'un nouveau type, plus adapté aux temps que nous vivons et dans une époque où le christianisme est appelé, comme il l'a toujours fait, à se ré inventer.
Si nous avons recréé une association culturelle et un comité pilote pour aider le conseil presbytéral à porter ce projet, nous restons tout de même une paroisse moyenne en nombre de personnes membres, avec un seul poste pastoral scindé sur la vie paroissiale et les actions culturelles. Nous sommes une église dont la profusion des actions reste invisible, par exemple par l'église institutionnelle, et aussi, encore, par la plupart des "paroissiens" eux-mêmes
C'est pourquoi nous devons être en mesure désormais d'affirmer davantage notre conviction, de nous donner ou recevoir des moyens pour activer notre vocation singulière - prosaïquement , nous doter d'un secrétariat plein, de moyens de captations vidéo et audio professionnels, améliorer nos locaux en finissant nos lourds travaux de mise en conformité entre autres déjà engagés, nous doter d'un service de communication pertinent pour faire saisir ce qui se passe ici, pleinement savoir ce que nous faisons au quotidien.
Tout simplement, commencer à savoir "nous" présenter et "manifester".