PREDICATION DU 8 NOVEMBRE 2015



LECTURES

Psaume 146 1Louez le SEIGNEUR (Yah) !Que je loue le SEIGNEUR !2Je louerai le SEIGNEUR tant que je vivrai,je chanterai pour mon Dieu tant que j’existerai.3Ne mettez pas votre confiance dans les nobles,dans des humains à qui n’appartient pas le salut.4Leur souffle s’en va, ils retournent à leur poussière,et le jour même leurs intentions disparaissent.5Heureux celui qui a pour secours le Dieu de Jacob,qui met son espoir dans le SEIGNEUR, son Dieu,6lui qui fait le ciel et la terre,la mer et tout ce qui s’y trouve,lui qui garde la loyauté pour toujours !7Il agit envers les opprimés selon l’équité ;il donne du pain aux affamés ;le SEIGNEUR relâche les prisonniers ;8le SEIGNEUR ouvre les yeux des aveugles ;le SEIGNEUR redresse ceux qui sont courbés ;le SEIGNEUR aime les justes.9Le SEIGNEUR garde les immigrés,il soutient l’orphelin et la veuve,mais il fait dévier la voie des méchants.10Le SEIGNEUR régnera toujours– ton Dieu, Sion, de génération en génération !Louez le SEIGNEUR (Yah) !

 

1 Rois 17.10-16 10Il s’en alla à Sarepta. Comme il arrivait à l’entrée de la ville, il y avait là une veuve qui ramassait du bois. Il l’appela et lui dit : Va me chercher un peu d’eau dans un récipient, je te prie, pour que je boive. 11Elle alla en chercher. Il l’appela de nouveau et lui dit : Va me chercher, je te prie, un morceau de pain dans ta main. 12Elle répondit : Par la vie du SEIGNEUR, ton Dieu, je n’ai rien de cuit, je n’ai qu’une poignée de farine dans un pot et un peu d’huile dans une cruche. Je ramasse deux morceaux de bois, puis je vais rentrer préparer cela pour moi et pour mon fils ; nous mangerons, après quoi nous mourrons. 13Elie lui dit : N’aie pas peur, rentre, fais comme tu l’as dit. Seulement, prépare-moi d’abord avec cela une petite galette et tu me l’apporteras ; tu en feras ensuite pour toi et pour ton fils. 14Car ainsi parle le SEIGNEUR, le Dieu d’Israël : Le pot de farine ne s’épuisera pas, et la cruche d’huile ne se videra pas, jusqu’au jour où le SEIGNEUR enverra la pluie sur la terre. 15Elle alla faire selon la parole d’Elie et pendant des jours elle eut de quoi manger, elle et sa maison, ainsi que lui. 16Le pot de farine ne s’épuisa pas, et la cruche d’huile ne se vida pas, selon la parole que le SEIGNEUR avait dite par l’intermédiaire d’Elie.

 

Marc 12.38-44 38Il leur disait, dans son enseignement : Gardez-vous des scribes ; ils aiment se promener avec de longues robes, être salués sur les places publiques, 39avoir les premiers sièges dans les synagogues et les premières places dans les dîners ; 40ils dévorent les maisons des veuves et, pour l’apparence, ils font de longues prières. Ils recevront un jugement particulièrement sévère. 41S’étant assis en face du Trésor, il regardait comment la foule y mettait de la monnaie de bronze. Nombre de riches mettaient beaucoup. 42Vint aussi une pauvre veuve qui mit deux leptes valant un quadrant. 43Alors il appela ses disciples et leur dit : Amen, je vous le dis, cette pauvre veuve a mis plus que tous ceux qui ont mis quelque chose dans le Trésor ; 44car tous ont mis de leur abondance, mais elle, elle a mis, de son manque, tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre

 

PREDICATION

 

Cela faisait longtemps que je l'esquivais, celle ci.

Qui ça ?

Qui ça, et bien cette veuve.

Je scrute chaque semaine, les textes du jour, et souvent, je la sens arriver. Mais souvent elle ne vient pas. Mais elle est tellement furtive, discrète que je me méfie..

Chaque dimanche, elle peut apparaitre, surgir, subitement, et puis je me dis souvent, ouf, elle n'est pas venue. Je ne serai donc pas obligé de parler d'elle.

Et puis aujourd'hui, profitant peut-être d'un moment d'innatention. Elle est là !
Vous allez me dire, qu'est ce qu'il en a après une pauvre veuve qui en plus ne lui a rien fait...Pourquoi l'éviter , cette pauvre veuve ?

Et bien parce que depuis 2000 ans, elle est la figure de la culpabilité. Elle va au Temple, et elle donne tout ce qu'elle a ! Alors que moi, mais vous aussi, je garde tout ce que j'ai, et je me justifie constamment, après tout, les études des enfants, c'est important, aider ses parents, c'est important, manger sainement c'est important...avoir un ordinateur, c'est important... c'est important, jusqu'à ce qu'elle surgisse, avec son regard noir qui me dit " tu es nul". "Tu n'es pas digne de Dieu" " tu es attaché à tes biens". " Le trésor de ta vie, c'est Toi"

Egoiste ! Radin !

 

Elle fascine, y compris ceux qui agencent les propositions des textes du jours, car ils la mettent en parallèle avec la veuve dite de Sarepta, qui à l'injonction du prophète Elie, donne tout ce qu'elle a, au risque de mourir.

Depuis 2000 ans, elle revient , donne tout ce qu'elle a, et elle repart.

Nous laissant traumatisés.

Ah mais ne la croyez pas si fragile... Elle est protégée par une armée de garde du corps , une longue et docile lignée de prédicateurs qui s'adressent - depuis 2000 ans - à des foules contrites et médusées, en leur suggérantv d'accomplir l'impossible, et puisque c'est impossible, les laissant ressortir du Temple triste... comme le jeune homme riche, dans une autre histoire de Jésus qui s'en repart triste, après n'avoir pas pu se débarrasser de tous ses biens.....donner l'intégralité de ses ressources à ...

A quoi finalement ? A qui ? Je ne sais pas moi, à Dieu ?, au Trésor de l'Eglise ??? Il y a peut-être certains prédicateurs qui à mon sens doivent inviter cette pauvre veuve dans leur show, pour inciter les gens médusés, à donner, à qui on ne sait pas, mais on est quand même intrigués de cette Mercédes flambant neuve devant le Temple...évidemment pas de l'Eglise Protestante Unie bien entendu...

Oui c'est vrai... donner à qui ? Dans le texte, il s'agit de l'offrande du Temple de Jérusalem, mais quand on transforme cette femme en symbole de la générosité sacrificielle..il faudrait donner à qui , à Dieu ? Mais où est la caisse ? Et qui valide ? Au temple ? Oui mais le Temple de Jérusalem et le Temple protestant, ça n'a rien à voir...

C'est à ce moment là de ma réflexion que les premiers doutes se sont installés, suivis par d'autres, et que je me suis dit : dis donc, ça fait 2000 ans qu'elle donne tout ce qu'elle a, elle en avait donc pas mal en réserve, finalement.

Ce qui est mauvais joueur , hein, je sais bien que cette femme est un personnage de fiction....Et que si elle a existé, elle ne peut pas avoir 2000 ans... Mes professeurs de théologie pratique me l'ont toujours dit : en prédication, il faut éviter l'humour, car : tu cliveras ton assemblée en quatre, ceux qui comprennent et qui rient, ceux qui ne comprennent pas et ne rient pas, ceux qui comprenant ou non, ne supportent qu'on rient au culte: il y a des café théatre pour ça, et ceux qui n'écoutent pas. Cette dernière catégorie étant le point fixe de toute assemblée depuis la nuit des temps. D'ailleurs je suis sur que quand Moise est descendu de la montagne avec ses tables, il y a des gens qui n'écoutaient pas.

Néanmoins, cette désacralisation par l'humour m'a liberé. M'a liberé du sort que me jetait ce personnage. Qui nous transformait tous en radins incapables.
Et j'ai pu me rendre compte de quelque chose.

Jésus décrit cette veuve, mais, ne fait AUCUN COMMENTAIRE. Il aurait pu, faire des commentaires du genre " agissant ainsi, elle est proche du règne de Dieu, elle aura sa récompense dans le ciel ou que sais je" . Je me suis rendu compte que ce pourquoi cette veuve me culpabilisait autant était du non pas au récit lui même mais à aux 2000 ans de commentaires nous enjoignant tous à donner tout ce qu'on a pour mériter quelque chose, nous enjoignant tous au suicide social pour mériter Dieu.

Jésus ne fait aucun commentaire après qu'il a décrit le comportement de cette veuve, alors qu'il en avait fait un après avoir décrit le comportement de ces scribes qui se pavanent avec de longues robes, il dit " ils recevront un jugement particulièrement sévère". Tandis que pour la veuve, aucun commentaire.

C'est simplement qu'il faut lire correctement le texte de Marc. Juste avant la description de la veuve, nous avons l'indication de ces riches qui mettent beaucoup.

Et c'est à ce moment là que j'ai compris l'arnaque de la tradition de commentaires liés à ce texte.

Ce n'est pas : faites comme cette veuve, et donnez tout ce que vous avez . Mais c'est plutôt:

regardez la situation réelle. Des riches donnent beaucoup mais donnent leur superflu, mais cette veuve n'a aucun superflu, donc elle donne ce qu'elle a.

Ce n'est pas : donnez le nécessaire et non le superflu.

C'est : regardez cette règle religieuse, cet impot religieux du Temple, qui permet à des riches de ne sentir aucune douleur dans leur obligation de donner, et qui envoie à la mort les pauvres.

C'est : quel est donc ce système où l'argent ne circule pas entre "ces riches" et cette veuve au point qu'elle risque la mort en accomplissant son devoir.

Et donc, de sorcière de la culpabilité , cette veuve s'est transformée en symbole de l'injustice et je remercie Dieu, encore une fois de m'avoir ouvert les yeux sur le propos du texte.

D'autant plus que quand on la compare avec la veuve de Sarepta, dans le livre des Rois, on est dans une impasse, car l'histoire de la prophétie d'Elie, c'est la description du retour de l'abondance, la sortie des problèmes pour cette veuve et son fils, 16Le pot de farine ne s’épuisa pas, et la cruche d’huile ne se vida pas,

Mais pour la veuve, il n'y a rien...

 

On peut même dire que les deux textes n'ont rien à voir... sauf si finalement, après avoir bien compris qu'il ne s'agit nullement de mettre en exergue cette veuve comme un parangon de la générosité, mais de bien la comprendre comme la preuve de l'injustice flagrante d'un système établi, on lit ce qui suit immédiatement dans Marc et d'ailleurs dans le texte parallèle de Luc. Je le lis chez Marc , un seul verset, sec :

 

1Alors qu'il sort du temple, un de ses disciples lui dit : Maître, regarde, quelles pierres, quelles constructions ! 2Jésus lui répondit : Tu vois ces grandes constructions ? Il ne restera pas pierre sur pierre qui ne soit renversée.

 

Alors je me réconcilie avec cette femme. Elle est simplement une victime d'une injustice, se sentant obligée d'obtenir les faveurs de son Dieu, dans une condition déjà de paria, puisque veuve, elle ruine jusqu'à ces chances minimes de s'en sortir, dans une boucle sans fin d'attente et de désespoir.

Comme beaucoup de femmes dans l'évangile, elle est une figure d'ange, porteur de la bonne nouvelle prophétique que l'établissement de l'injustice sera détruit, intégralement.

Mais pour cela, il va falloir que nous y mettions un peu plus que le superflu de notre engagement.

AMEN

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