Psaume 116
1J’aime... car le SEIGNEUR entendma voix, mes supplications ;2car il a tendu son oreille vers moi ;je l’invoquerai toute ma vie.3Les liens de la mort m’avaient enserré,et les angoisses du séjour des morts m’avaient atteint ;j’avais atteint le fond de la détresse et du chagrin.4Mais j’invoquai le nom du SEIGNEUR :S’il te plaît, SEIGNEUR, sauve-moi !5Le SEIGNEUR est clément et juste,notre Dieu est compatissant ;6le SEIGNEUR garde les naïfs ;j’étais affaibli, et il m’a sauvé.7Moi, je retourne à mon repos,car le SEIGNEUR m’a fait du bien.8Oui, tu as délivré ma vie de la mort,mes yeux des larmes,mes pieds de la chute.9Je marcherai devant le SEIGNEURsur la terre des vivants.10J’ai cru quand j’ai parlé ;j’étais très affligé.11Je disais, dans ma précipitation :Tout homme est menteur.12Comment rendrai-je au SEIGNEURtous ses bienfaits envers moi ?13Je lèverai la coupe du salutet j’invoquerai le nom du SEIGNEUR ;14je m’acquitterai de mes vœux envers le SEIGNEUR,devant tout son peuple.15Elle a du prix aux yeux du SEIGNEUR,la mort de ses fidèles.16S’il te plaît, SEIGNEUR ! Je suis ton serviteur,ton serviteur, le fils de ta servante.Tu as détaché mes liens.17Je t’offrirai un sacrifice de reconnaissance– j’invoquerai le nom du SEIGNEUR ;18je m’acquitterai de mes vœux envers le SEIGNEUR,devant tout son peuple,19dans les cours de la maison du SEIGNEUR,au milieu de toi, Jérusalem !Louez le SEIGNEUR (Yah) !
Marc 9.2-10
2Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et il les conduit seuls à l’écart, sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux : 3ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle qu’il n’est pas de teinturier sur terre qui puisse blanchir ainsi. 4Elie avec Moïse leur apparurent ; ils s’entretenaient avec Jésus. 5Pierre dit à Jésus : Rabbi, il est bon que nous soyons ici ; dressons trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie. 6Il ne savait que dire, car la peur les avait saisis. 7Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée survint une voix : Celui-ci est mon Fils bien-aimé. Ecoutez-le ! 8Aussitôt ils regardèrent autour d’eux, mais ils ne virent plus personne que Jésus, seul avec eux. 9Comme ils descendaient de la montagne, il leur recommanda de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu jusqu’à ce que le Fils de l’homme se soit relevé d’entre les morts. 10Ils retinrent cette parole, tout en débattant entre eux : que signifie « se relever d’entre les morts »
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Ma première partie va planter ces racines dans cette rumination des disciples après l'expérience qu'ils ont vécu, quand ils redescendent... et se mettent à débattre entre eux se demandant ce que signifie " se relever d'entre les morts".
C'est manifestement dans l'évangile de Marc une vraie question de catéchèse, destinée à ce que ses lecteurs ou auditeurs en débattent.
Ma seconde partie répondra à leur question !
Les disciples ont donc vécu une expérience extraordinaire, mais ils en sont encore à se demander ce que signifie ressusciter d'entre les morts. C'est notre condition à nous aussi. Nous oublions sans cesse que nous faisons sans cesse une expérience extraordinaire : l'expérience de la vie, mais il nous arrive de ruminer des questions. Des questions, légitimes, certes, et déjà c'est mieux de se poser des questions que de tout accepter sans réfléchir à quoi que ce soit. Sans même s'apercevoir qu'on n'a plus la capacité de réfléchir. Notez donc, déjà, au moins que les disciples de Jésus, réfléchissent. Même en ruminant.
A propos de la resurrection d'entre les morts, souvent la solution c'est de conclure au mystère. Ou de renvoyer à la confession officielle de la foi, qui emploie les mots "ressurrection de la chair" et " vie éternelle" . Renvoyer à la confession de foi, c'est s'abriter dans une parole commune, qui a le mérite d'exister. Ou alors nous évoquons notre septicisme, ou notre doute, ou nous haussons les épaules.
On va éclaircir le problème. Distinguer ce dont on parle de ce dont on ne parle pas quand on évoque ce rélèvement - c'est le mot que le mot plus religieux de resurrection a recouvert - ce rélèvement d'entre les morts.
Dans la Bible, il n'y en a pas tant que ça de ces rélèvements, mais on peut tout de même déjà en compter 7 pour des personnes , disons comme vous et moi, qui ont été relévées.
Le fils de la veuve par Élie (1 Rois 17:17-24) Le fils de la Shunamite par Élisée (2 Rois 4:18-37) La fille de Jaïre par Jésus (Marc 5:22-43) Le fils de la veuve par Jésus (Luc 7:11-17) de Lazare par Jésus (Jean 11:1-43) de la disciple Tabitha par Pierre (Actes 9:36-42) , celle d’Eutyque, un brave garçon qui s'était endormi d'ennui pendant la longue prédication de Paul et qui est tombé d'un troisième étage , mais Paul l'a quand même ressuscité (Actes 20:7-12)
Il y a deux résurrections on va dire généralistes ou très symboliques
un Hébreu par les ossements d’Élisée (2 Rois 13:21)
Et de nombreux saints à la mort de Jésus (Matthieu 27:52-53)
Et puis bien sûr il y a la resurrection de Jésus.
Et enfin, il y aurait la question de notre resurrection, que nos confessions de foi officielles nomment "resurrection de la chair", et qu'elles associent à la "vie éternelle"
Et non pas, entre parenthèses, "immortalité de l'âme" , qui est une notion extra biblique , qui rejoint d'autres concepts ésotériques sur lesquels je ne viens pas mais qui tous séparent l'esprit et le corps. En matière biblique, on peut distinguer, mais on ne sépare rien.
Les resurrections de personnes que j'ai appelées comme vous et moi, sont à écarter de la discussion des disciples. Ce ne sont, si je puis dire, que des guérisons extrêmes, même si elles sont spectaculaires. Je ne veux pas dire qu'elles sont explicables, je ne disconviens pas que ces récits aient pu être farfelus, je dis simplement que ces rélèvements n'entrent pas dans le registre de la question que les disciples ruminent car les corps morts ici sont simplement ramenés. Vous avez vu le nombre de fils et de filles. Ils sont raménés chez leurs parents, ou simplement dans la vie ordinaire. Chez nous.
Passons aussi sur les resurrections symboliques d'Ezéchiel , qui parle de la reconstitution d'un peuple, et les sorties de tombeaux en masse évoquées dans Matthieu, qui ne constituent probablement pas un fait d'une historicité évidente, que nous laisserons dans le domaine du symbolique.
Alors, il nous reste le relèvement de Jésus, tel qu'il est évoqué de diverses façons dans les quatre évangiles et sans d'ailleurs, dit-on, dans tous les commentaires, sans avoir jamais été décrit.
Mais c'est faux. Ici, dans notre récit de la métamorphose, la resurrection est décrite. Si nous voulons donner un nouveau crédit à ce passage de nos confessions de foi qui évoquent la résurrection de la chair et la vie éternelle, il nous faut retourner à ce récit. Si nous voulons savoir de quoi on parle, et ce qu'on croit quand on récite le crédo officiel, il faut retourner à ce récit.
L’expérience de la transfiguration, ou de la métamorphose, mais que je peux appeler aussi l’expérience du ravissement, plusieurs d'entre nous, croyants ou pas croyants, l’ont déjà vécu, ou la vivent d’une façon courante.
Quelques exemples : tout à coup, on croise soudain, chez quelqu’un, un regard vivant ; dans un corps, on perçoit une intensité autre; Le récit de la métamorphose parle de ce mystère vérifiable : dans un corps quotidien, une présence différente affleure.
Cette chair dont nous sommes faits parle, ou plus précisemment témoigne ;
que la vie qu'elle accueille se trouve bien en elle,
mais que cette vie ne vient pas que d'elle.
Qu’elle vient de plus loin , d'une source différente de beauté
C’est l’évidence palpable et déroutante, de la vie alors que les apparences, les formats, la morale, les discours, la culture qui habillent cette chair, disent autre chose. La chair est habitée par la vie, et cette vie peut se révéler à nous, si nous savons voir, ou si nous avons le désir de voir.
Jésus invite aujourd'hui trois de ses disciples à ce type d’expérience : percevoir, dans le corps bien connu de leur maître, la lumière d'une vie inconnue. Cette lumière se manifeste largement dans son corps, ses vêtements. Elle s'étend même à l'espace qui entoure ce corps, elle s’étend même à d’autres époques. Moïse et Élie sont là aussi, qui arrivent comme témoins que cette vie-là, n’est pas discontinue, qu’elle n’est pas séparable en époques, en tranches culturelles, ou formes de vie.
Les disciples veulent mettre chacun sous sa tente et le narrateur nous informe qu’en fait, ils ne savaient pas quoi dire.
Moise n’a jamais atteint la terre promise, pourtant il est là. Elie, le plus célèbre des prophètes après avoir été enlevé dans le ciel n’est jamais redescendu sur terre, pourtant il est là. Morts, ou vivants, ou suspendus entre la vie et la mort, ils sont là, comme Pierre, Jacques et Jean sont là. De la même façon. Dans ce ravissement, la révélation est faite que la vie n’est pas séparable , qu’elle est la vie de ce monde ci et de ce monde-là. C'est le relèvement, la resurrection de la chair. C'est la vie éternelle.
Pierre Jacques Jean Jésus Moïse et Elie sont assemblés dans cette expérience de communion universelle et trans temporelle.
Ils vivent l'expérience du rélèvement, qui prend ici tout son sens. Ce qui est relevé, au travers de la chair, c'est la vie de Dieu, et son éclatante lumière, une lumière qui n'aveugle pas, qui ne surveille pas, qui ne brûle pas, mais qui donne enfin la certitude qu'un au delà très proche est le lieu d'une paix profonde, bienfaisante, éternelle. Cette resurrection n'a pas un rapport exclusif avec l'accident de la mort. Elle est au delà de la mort.
Le lieu de révélation n’est pas que la chair, il faut aller plus loin et évoquer tout le visible.
Chacun de nous a pu faire cette expérience de ravissement, expérience intime, pas racontable, expérience qui pourtant consolide sa foi et son espérance.
Ce que ce récit de la métamorphose raconte, c’est l’expérience de la réalité profonde du monde. Et la resurrection, y compris la nôtre vient de cette réalité là.
Certains, croyants ou non, comprennent que la vie vient de plus loin. Ils l'ont compris. Leur entendement devient poreux à la vie venue d'ailleurs, qui s’ouvre devant eux. Ils commencent à se relever d'entre les morts. Ils vivent déjà l'experience du relèvement de la chair.
Devenir disciple du Christ, c’est devenir habile à voir les êtres et les choses. C’est apprendre à lire, la chair, le monde, à les étudier. Non pas au moyen unique de l’intelligence courante, mais aussi par l’Esprit.
Que l'on soit croyant ou pas, quand on voit cette beauté dans une chair ou dans n’importe quelle manifestation du visible qui, apparemment, n'a rien pour elle, alors, on fait une expérience spirituelle.
Suivre Jésus dans les évangiles, ce n’est pas prétendre « voir » Dieu, c’est plutôt s’appliquer à regarder le monde tel que Dieu le voit, à travers le regard du Christ.
Qui aurait cru que d’une chair lépreuse, la vie de Dieu allait briller ? Que de quelques paroles de papier, le pardon allait agir sur un lecteur ? Qui aurait cru que de la chair et dans la chair d’une femme adultère en danger de mort, la justice de Dieu allait se manifester ? Qui croirait que dans votre chair, à vous, ce matin, la vie de Dieu ne demande qu’à s’exprimer et à témoigner , à se revéler?
Avez-vous déjà imaginé le regard de Dieu sur vous ? Vous êtes vous déjà vu tel qu’il vous voit ? Essayez, et vous vivrez l’expérience de la métamorphose, vous aurez la chance de saisir le concret de que l’on appelle la spiritualité. Qui consiste donc à se voir ressuscité dans le regard de Dieu.
Après ce ravissement, les disciples ne voient plus que Jésus seul avec eux. De même, nous-mêmes, après ces expériences intimes de révélation de la vie de Dieu, nous restons seuls avec nous-mêmes et nous nous laissons rhabiller de la culture, des habitudes, des discours qui nous poussent à voir les choses, les autres, nous-mêmes, tels qu'il le faut.
Nous nous taisons, comme si nous obéissions à la recommandation faite par Jésus aux disciples de se taire.
L’instant d’après, quand tout semble redevenir gris. Alors que même dans ce gris, la vie de Dieu affleure toujours, ne demande qu'à se relever.
Peut-être que nous devons acquérir de l’expérience.Du chemin
Vivre la spiritualité réelle, cela s’apprend, et dans cet apprentissage, qui prend du temps, peut-être le temps d’une vie biologique, il y a l’acceptation de devoir continuer à marcher dans le monde commun, mis en scène actuellement dans un théâtre de l'absurde et de l'horreur.
Mais dès le début, nous le savons. Dans ce qui n'a l'air de rien, la splendeur de Dieu palpite, la vie de Dieu affleure.
Alors, soyons plus intelligents que les disciples, qui viennent de vivre l'experience de la resurrection de la chair, c'est à dire l'experience de la manifestation plénière de la vie de Dieu dans cette chair, mais qui se demandent encore.
Comme si nous ne devions trouver de la consistance en la vie qu'en nous demandant, encore, et encore.
AMEN.