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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

"les trois formules négatives de Pâques"

Ou comment trouver vraiment la foi
Prédication de Robert Philipoussi



PRÉDICATION
 

3 formules négatives célèbres.
Nous trouvons dans ce célèbre récit 3 formules tout autant célèbres mais qui ont une caractéristique commune. Elles sont toutes trois des formules négatives :
La première : Elles ne trouvèrent pas le corps de Jésus,
alors qu'elles étaient venues pour l'embaumer.
La deuxième : Il n'est pas ici.
Disent aux femmes les deux hommes qui ont des habits qui resplendissent
et enfin, sans doute la plus célèbres des négatives de Pâques : Ils ne crurent pas les femmes,
c'est la réaction générale des disciples

Nous allons aborder ces négatives célèbres pour avec elles comprendre comment ce récit de Pâques vient instituer un nouveau rapport à Dieu, une nouvelle considération de l'acte même de croire.
Chaque formule deviendra un obstacle sur notre chemin de la foi, mais aussi une chance de croire – je dirais- de croire « mieux », ou de croire vraiment. Un peu comme le « vraiment » du « vraiment » ressuscité.
 

« Elles ne trouvèrent pas le corps de Jésus »
Ce petit matin de Pâques commence par une déception. Ces femmes ont un travail – qui est leur travail - à faire. Le travail des femmes est d'accueillir le corps humain quand il nait mais aussi d'accueillir le corps de l'humain quand il est mort. Embaumer les morts, c'est ce qui leur incombe parce que ce sont des femmes et que les femmes dans cet endroit là et en ce temps là, c'est ce qu'elles font.
Le travail particulier de ces femmes ce matin-là est d'accueillir le corps mort de leur maître. Mais ce matin- là :  elles sont privées de cette tâche.
Le corps n'était pas là. C'est aussi violent qu'une grossesse qui serait suivie de rien.
Dans ce moment là - où il ne peut pas être encore question de se réjouir - le fait que ce qui devait se passer ne se passe pas est une profonde déception qui va se mêler à de l'angoisse.
Non seulement parce ces femmes n'ont pas la possibilité d'embaumer le corps de celui qu'elles aimaient, mais aussi parce que, brusquement, il se révèle qu'elles sont devenues inutiles. Vacantes.
« Elles ne trouvèrent pas le corps de Jésus » : voilà une formule-clé, qui peut commencer à illustrer les difficultés à croire en général. Dans le sens où « croire », ne serait pas simplement « admettre l'existence d'un Dieu », mais serait : naître ou renaître à la confiance, espérer contre toute attente.
Voilà: sur le chemin de la foi, nous cherchions un corps et nous n'avons pas trouvé le corps.
Ce que nous cherchions, c'était un Dieu immobilisé là où il aurait été mis. Un Dieu sans vie, c'est à dire sans parole, sans souffle, et c'est ce Dieu là que nous cherchions parce que, sans doute, c'était la seule conception de lui que nous avions.
Nous devions le trouver pour vraiment arriver à croire, et ne le trouvant pas, ne trouvant pas, par exemple dans une Église ou une communauté chrétienne, ce qui pour nous représente « la consistance », et bien nous sommes déçus, et soit nous abandonnons, ou alors, nous nous mettons à croire en demi teinte.
Il s'agit là d'une déception particulière.
Je vais illustrer par une image, mais ne vous laissez pas fasciner par l'image. Parfois des personnes rejoignent notre église en croyant y trouver quelque chose comme par exemple : « une communauté idéale de frères et des sœurs réconciliés dans l'amour » et comment dire ?  Ces personnes ne trouvent pas ça parce que nous sommes plutôt une communion un peu disparate de gens qui travaillent leur mission de devenir des frères et des sœurs.
Ne trouvant pas l'Éden de stabilité qu'elles attendaient, des personnes nouvelles peuvent être sont déçues. Et soit elles s'en vont , soit elles se mettent en demi teinte.
Je dirais que ces personnes n'ont pas trouvé  "le corps  mort" , c'est à dire la correspondance exacte de ce qu'elles attendaient.
Ces femmes qui ne trouvent pas le corps représentent symboliquement tous ces prêtres des religions anciennes qui en ce jour de Pâques sont réduit au chômage.

« parce que nous n'avons pas trouvé le corps »
Retournons à nous, dans notre chemin de foi. Nous pouvons rester déçus et sans savoir que ce premier élément de déception pouvait être le détonateur de l'espérance, dans le sens où heureusement que nous n'avons pas trouvé ce Dieu là, immobile, muet, sans respiration, car nous lui aurions offert nos hommages, et nous aurions adoré la mort.
 
Pour ne pas en rester là, au stade de la déception qui pourrait donner envie de tout laisser tomber, ou de rester en demi-teinte pour l'éternité, nous avons besoin de quelqu'un d'autre, qui va nous faire percevoir que notre désir de consistance - d'avoir un corps - n'était pas en soi erroné ,  l'erreur était plutôt  notre propension à le confondre avec un corps mort .
Il nous faut quelqu'un d'autre donc. Et, ici dans ce récit les «  autres » sont ces deux hommes en habits resplendissant, qui vont nous dire, notre deuxième négative du jour.
Deuxième obstacle, deuxième chance de salut :

"Il n'est pas ici"
Il y a un corps, mais il est mobile, et refusera sans doute qu'on l'embaume. Votre désir d'un Dieu immobile – en quelque sorte un Dieu parfait, un dieu dont on peut faire ce que l'on veut – était une erreur. Le vrai Dieu ne va pas se laisser faire. Il ne reste pas là où on le met. 
A l'image de ce Jésus qui a été ressuscité.
 
"Il n'est pas ici"
Donc pas forcément dans vos concepts, vos a priori, présupposés, ou connaissances. Il ne fait pas partie de votre imaginaire, même le plus riche, le plus théologique, le plus savant, voire le plus croyant.
 
"Il n'est pas ici"
Après la déception du début, entendre que celui qu'on cherche n'est pas ici peut encore être une raison de cesser de croire... S'il n'est pas ici, à quoi sert il que je me sois déplacé ?
De plus, cela sous-entendrait que croire nécessiterait un effort...celui en l'occurrence de se déplacer, d'ici - où il n'est pas – à là-bas, où il est peut-être.
Là bas, pourquoi pas au-delà !
 
Mais cette information donnée par ceux qui ont eu la délicatesse de nous parler peut aussi dissiper notre déception initiale, et nous inspirer, pour justement, commencer un chemin –
un chemin qui ne finira donc pas dans l'impasse d'un sépulcre, mais ailleurs
 
Voici maintenant, notre troisième négative:
"Ils ne crurent pas les femmes"
Dans notre chemin de foi, nous aurions franchi les deux obstacles – la déception de ne pas avoir trouvé ce que nous voulions trouver, et la paresse d'aller ailleurs qu'ici,
le troisième obstacle, celui qui nous fait envisager que personne ne va nous croire risque risque nous arrêter définitivement.
 
C'est vrai au fond, qui va croire cette histoire insensée !
Alors peut-être faut il abandonner .
Si nous-mêmes n'y croyons plus, nous ne souffrirons pas que personne ne croit ce que nous-mêmes ne croyons plus.
Ou bien sur, encore:  choisir la demi-teinte. S'arranger pour rester au milieu de gué. Être à l'exact endroit du croire où , n'y mettant pas trop de conviction, nous n'allons pas nous exposer à tous ces gens qui iront nous dire que ce que nous racontons sont des « niaiseries »
 
Mais c'est à ce moment-là que cet obstacle peut devenir une chance : car si nous avons franchi le deuxième obstacle, si nous avons cru ce que ces deux hommes ont dit «  Il n'est pas ici »
Nous l'avons cru parce que tout à coup ça a réveillé ce désir de croire et d'espérer, car nous n'en pouvions plus d'être condamner à la tristesse, à l'ironie triste, et au cynisme... ou même à la demi-teinte.

"Il n'est pas ici"
C'était une bonne nouvelle !
Alors, peut-être qu'il va falloir s'exposer au fait que les gens à qui nous témoignons puissent considérer que ce que nous que leur colportons ne sont que des niaiseries !
 
Parce que nous, nous avons été relevés, relevés de la déception, relevé du culte du dieu mort, nous avons retrouvé un élan pour aller de ICI à Là bas – plutôt que de rester ici , et nous avons compris ce que ce relèvement de Jésus signifiait de notre façon de croire.
Nous avions failli abandonner.
Nous avions failli rester dans une foi moyenne, qui ne s'expose pas et qui ne risque rien,
Mais, voilà,
il était possible d'avoir un trajet différent.
Il était donc possible de réanimer le cœur de notre existence.

Texte de l'évangile de Pâques 2019
Texte de l'évangile de Pâques 2019

"les trois formules négatives de Pâques"
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