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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

CULTE DU 1er SEPTEMBRE 2024 LA LOI ET LA TRADITION. LE PUR ET L'IMPUR. Prédication par Nicolas Bonnal



LA LITURGIE

ORGUE

 

SALUTATION

 

En ce premier culte après quatre dimanches de pause, nous nous accueillons nous-mêmes en ce temple de Port-Royal. Soyons-y tous les bienvenus. Ceux qui y viennent pour la première fois, ceux qui y retournent après ces quatre dimanches. Ceux qui ont fréquenté, pendant cette pause, d’autres lieux de louange et de prière, ceux qui ont décidé d’en profiter pour dormir le dimanche matin…

 

C’est le Seigneur qui nous accueille, heureux qu’il est, lui aussi, de nous retrouver ici ensemble.

 

INVOCATION

 

C’est que, comme l’écrit l’épitre de Jacques (1, 17 et 18, un des textes du jour) :

 

« Tout don de valeur et tout cadeau parfait descendent d’en haut, du Père des lumières chez lequel il n’y a ni balancement ni ombre due au mouvement. De sa propre volonté, il nous a engendrés par la parole de vérité, afin que nous soyons pour ainsi dire les prémisses de ses créatures. Sachez-le, mes frères bien aimés. »

 

L’Éternel nous salue, il offre sa paix et sa joie à chacune et chacun d'entre nous, à notre assemblée de sœurs et de frères qui se retrouvent en ce jour pour le louer, le prier et méditer sa parole.

 

AMEN

 

(DEBOUT)

 

LOUANGE (PSAUME 92)

 

2 Il est bon de louer l’Éternel, de te célébrer par des chants, ô Très-Haut!

3 Et de proclamer, dès le point du jour, ton amour, tout au long des nuits, ta fidélité,

4 sur la cithare à dix cordes, sur le luth et sur la lyre.

5 Ce que tu fais, Éternel, me remplit de joie et j’acclamerai les ouvrages de tes mains.

6 Que tes œuvres sont grandioses, Éternel ! Que tes pensées sont profondes!

7 L’insensé n’y connaît rien, le sot ne peut les comprendre.

8 Si les malfaisants croissent comme l’herbe, si tous les méchants sont si florissants, c’est pour périr à jamais.

9 Mais toi, tu es tout là-haut, Éternel, pour toujours.

10 Car voici tes ennemis, Éternel, car voici tes ennemis périssent, et tous ceux qui font le mal seront dispersés!

11 Mais tu me remplis de force, je suis comme un buffle, je me suis enduit d’huile fraîche.

12 Je regarde tous mes détracteurs, j’entends tous mes adversaires qui s’emploient au mal.

13 Car les justes poussent comme le palmier, ils grandissent comme un cèdre du Liban.

14 Bien plantés dans la demeure de l’Éternel, ils fleurissent sur les parvis du temple de notre Dieu.

15 Ils seront féconds jusqu’en leur vieillesse et ils resteront |pleins de sève et de vigueur,

16 ils proclameront combien l’Eternel est droit: il est mon rocher, on ne trouve en lui aucune injustice.

 

CHANT Ps 92, les 4 strophes page 106

 

(ASSIS)

 

PRIÈRE DE CONVERSION (LECTEUR)

 

Seigneur, nous nous présentons devant toi tels que nous sommes. 

Tu nous connais mieux que nous ne nous connaissons nous-mêmes. Tu sais nos défauts, nos insuffisances.

Devant toi, nous savons que nous ne pouvons faire passer pour autres que nous sommes. 

Nous ne pouvons travestir nos silences ou notre capacité à détourner le regard devant les malheurs de notre monde en de la discrétion ou de l’humilité.

Tu ne prends pas notre éperdu désir d’être aimés ou admirés et ce qu’il nous conduit à faire pour du courage ou de la générosité.

Tu ne te laisses pas abuser par nos grandes déclarations, quand elles restent vaines, par nos émotions, quand elles ne nous mettent pas en mouvement. 

Nous voici, nus et silencieux, devant toi. Que ton regard aussi pénétrant que bienveillant nous enveloppe et nous rendent lucides.

Révèle-nous à nous-mêmes. Amen

 

CHANT 45-01, strophe 1, page 680

 

ANNONCE DU PARDON (LECTEUR)

 

Que tous ceux qui se tournent vers Dieu avec confiance reçoivent de lui la certitude de son amour.

 

Voici ce que dit Jésus :

« L’Esprit m’a envoyé pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres ; pour proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue.

Et Jésus ajoute :

Aujourd'hui cette parole quand vous l'entendez, est accomplie. » (Luc 4)

 

Qu’ainsi :

Toutes celles et tous ceux qui se sentent pauvres dans leur cœur se réjouissent de la Bonne nouvelle de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ, que toutes celles et tous ceux qui se reconnaissent aveugles reçoivent l’assurance que Dieu vient ouvrir leurs yeux, que toutes celles et tous ceux qui se sentent captifs sentent leurs chaînes tomber par la force de la Parole de Dieu.

 

Car aujourd'hui, cette parole est accomplie pour toutes celles et tous ceux qui l'entendent.

 

(DEBOUT)

 

CHANT 45-01, strophe 2 , page 680

 

VOLONTÉ DE DIEU (LECTEUR)

 

Écoutons ensemble ce que l'apôtre Paul nous propose de chercher à vivre à la suite de notre Dieu :

 

Voici la voie par excellence, nous dit Paul,

 

L’amour prend patience ; l’amour rend service.

Il ne jalouse pas, il ne se vante pas,

il ne s’enfle pas d’orgueil,

il ne fait rien de malhonnête,

il ne cherche pas son intérêt,

il ne s’irrite pas, il n’entretient pas de rancune,

il ne se réjouit pas de l’injustice,

 

Mais l’amour trouve sa joie dans la vérité.

Il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il endure tout.

L’amour ne meurt jamais.

 

Et maintenant ces trois choses demeurent :

la foi, l'espérance, et l’amour ;

mais la plus grande de ces réalités, c'est l’amour.

Suivez l’amour. (1 Cor 13)

 

CHANT 45-01, strophe 4 , page 680

 

(ASSIS)

 

PRIÈRE D'ILLUMINATION (ENSEMBLE LECTEUR)

 

Seigneur, quand le bruit du quotidien nous empêche d’entendre ta voix,

quand le bruit de nos soucis couvre tes paroles d’espérance,

quand le tumulte de la vie semble nous emporter, éveille nos cœurs à ta Parole.

 

Seigneur, quand nous n’arrivons plus à discerner ce qui est prioritaire,

quand nous ne voyons plus que l’ombre des choses,

quand nous ne savons plus distinguer l’essentiel du superflu,

ouvre nos yeux à ta présence.

 

Éveille nos cœurs à la Parole que nous allons entendre maintenant,

qu’elle soit notre nourriture, celle qui nous permet d’avancer et de toujours espérer.

 

Amen

 

LECTURES (LECTEUR)

 

Évangile selon Marc ch 7. Versets 1 à 23 :

 

1 Les Pharisiens et quelques scribes venus de Jérusalem s’assemblèrent autour de Jésus. 

2 Ils virent quelques-uns de ses disciples prendre leur pain avec des mains impures, c’est-à-dire non lavées. 

3 Or les Pharisiens et tous les Juifs ne mangent pas sans s’être soigneusement lavé les mains, parce qu’ils tiennent à la tradition des anciens. 

4 Et, quand ils reviennent de la place publique, ils ne mangent qu’après avoir fait les aspersions rituelles. Ils ont encore beaucoup d’autres observances traditionnelles, comme le lavage des coupes, des cruches et des vases de bronze. 

5 Les Pharisiens et les scribes lui demandèrent : Pourquoi tes disciples ne marchent-ils pas selon la tradition des anciens, mais prennent-ils leur pain avec des mains impures ? 

6 Jésus leur répondit : Ésaïe a bien prophétisé sur vous, hypocrites, ainsi qu’il est écrit : 

Ce peuple m’honore des lèvres, Mais son cœur est très éloigné de moi ; 

7 C’est en vain qu’ils me rendent un culte ; En enseignant des doctrines Qui ne sont que préceptes humains. 

8 Vous abandonnez le commandement de Dieu, et vous tenez à la tradition des hommes. 

9 Il poursuivit : Vous rejetez bel et bien le commandement de Dieu pour garder votre tradition. 

10 Car Moïse a dit : Honore ton père et ta mère, et : Celui qui maudira son père ou sa mère sera puni de mort. 

11 Mais vous, vous dites : Si un homme dit à son père ou sa mère : Ce dont j’aurais pu t’assister est qorbân, c’est-à-dire une oblation à Dieu,

12 vous le laissez ne plus rien faire pour son père ou pour sa mère ; 

13 vous annulez ainsi la parole de Dieu par votre tradition que vous vous êtes donnée. Et vous faites bien d’autres choses semblables.

14 Il appela de nouveau la foule et lui dit : Écoutez-moi tous et comprenez. 

15 Il n’est rien qui du dehors entre dans l’homme qui puisse le rendre impur ; mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui le rend impur. 

16 Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende. 

17 Lorsqu’il fut entré dans la maison, loin de la foule, ses disciples l’interrogèrent sur cette parabole. 

18 Il leur dit : Vous aussi, êtes-vous donc sans intelligence ? Ne saisissez-vous pas que rien de ce qui, du dehors, entre dans l’homme ne peut le rendre impur ? 

19 Car cela n’entre pas dans son cœur, mais dans son ventre, puis est évacué à l’écart. 

20 Il déclarait purs tous les aliments. Il disait : Ce qui sort de l’homme, voilà ce qui le rend impur. 

21 Car c’est du dedans, c’est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, prostitutions, vols, meurtres, 

22 adultères, cupidités, méchanceté, ruse, dérèglement, regard envieux, blasphème, orgueil, folie. 

23 Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l’homme impur.

 

ORGUE

 

PRÉDICATION

 

ORGUE BREF

 

(DEBOUT)

 

CONFESSION DE FOI (LECTEUR)

 

Nous confessons notre foi avec un texte d’André Dumas

 

Nous croyons en un Dieu qui est pour l’être humain, mais qui est autre que l'être humain, qui est notre allié, mais dont la parole est plus vraie que notre vie et plus forte que notre mort. 

Nous croyons qu’il crée et qu’il recrée le monde contre le chaos et la dislocation, contre l’obscurité et le silence.

 

Nous croyons en Jésus-Christ, qui a montré pleinement Dieu à l’être humain et l’être humain à Dieu, qui a vécu pour enseigner, pour annoncer et pour guérir, qui est mort comme nous, à cause de nous et pour nous, qui a été ressuscité pour rendre manifeste la mémoire, la bonté et la puissance de Dieu en faveur de nous tous.

 

Nous croyons à l’Esprit Saint, qui continue d’œuvrer chez les êtres humains comme la graine continue de pousser au travers de l’hiver. Nous croyons. 

Aide-nous à vivre ce que nous cherchons à croire. Amen.

 

 

CHANT 36-12, les 4 strophes, page 508

 

(ASSIS)

 

ANNONCES ET OFFRANDE (orgue)

 

ANNONCES POUR DIACONAT FRATERNEL

 

 

PRIÈRE D'INTERCESSION (LECTEUR)

Nous prions les uns pour les autres

 

Seigneur notre Dieu,

 

Nous te présentons notre monde tel qu’il est. 

 

Les guerres qui le ravagent, au Proche-Orient, en Ukraine, au Soudan, ailleurs, hélas. 

Les souffrances qu’elles entraînent pour tes enfants, victimes de l’appétit de puissance, des murs de séparation, des fanatismes.

 

Les inégalités qui le divisent, entre Nord et Sud, entre riches et pauvres, entre jeunes et vieux, entre handicapés et valides.

 

Nous te présentons toutes nos sœurs et tous nos frères humains. Celles et ceux qui souffrent, qui luttent, qui subissent, celles et ceux, aussi, qui oppriment ou font semblant de ne rien voir.

 

Nous te présentons nos églises, ces communautés qui se réclament de toi, et qui pourtant ont trop souvent leur part, elles aussi, dans les malheurs du monde. Ainsi, nous te présentons les églises évangéliques américaines, l’église orthodoxe russe, nos églises protestantes européennes, si souvent silencieuses. Nous te présentons les églises de Palestine, du Soudan, d’Ukraine et d’ailleurs qui tentent, tant bien que mal, d’être présentes auprès de celles et ceux qui souffrent, de ne jamais rompre le fil du dialogue.

 

Nous te présentons notre petite église de Port-Royal Quartier latin. Aide-nous à en prendre soin, de sorte qu’elle continue, modestement, à participer à l’annonce de ta parole. 

 

Nous te présentons notre monde politique, qu’il sache se rassembler pour œuvrer à une société meilleure. 

Nous te présentons les artistes, les chercheurs, les enseignants, tant d’autres qui contribuent à rendre le monde que tu as voulu meilleur. 

 

Nous te présentons tous ceux qui, autour de nous, sont affectés par la maladie, le deuil, la solitude, la dépression, les difficultés de toutes sortes. Nous les nommons dans le secret de nos cœurs. 

 

Permets que nous soyons, avec toi, et dans un même élan, à leurs côtés.

 

Et nous rassemblons toutes nos prières dans celle que ton fils nous a laissée : 

 

NOTRE PÈRE

 

CHANT 21-04, les 3 strophes, pages 232-233

 

EXHORTATION

 

C’est vous qui êtes le sel de la terre. Mais si le sel perd son goût, comment pourrait-on le rendre à nouveau salé ? Il ne sert plus à rien ; on ne peut que le jeter dehors, et les gens marchent dessus.

C’est vous qui êtes la lumière du monde. Une ville construite sur une colline ne peut pas être cachée. On n’allume pas une lampe pour la mettre sous un seau. Au contraire, on la place sur son support d’où elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison. C’est ainsi que votre lumière doit briller devant les hommes afin qu’ils voient le bien que vous faites et qu’ils louent votre Père qui est dans les cieux.

 

(DEBOUT)

 

BÉNÉDICTION

 

Que le Dieu vivant vous bénisse et vous garde. Au travail ou au repos, dans le tumulte ou dans le calme. Chaque jour et chaque moment qu'il créé, qu'il soit à vos côtés et que sa présence illumine vos jours et ceux de vos bien-aimé.e.s. AMEN

 

(ASSIS)

 

ORGUE


LA PRÉDICATION

predication_par_nicolas_bonnal,_1er_septembre_2024.mp3 Prédication par Nicolas Bonnal, 1er Septembre 2024.mp3  (52.79 Mo)

predication,_marc_7,_1_23,_par_nicolas_bonnal__port_royal_1er_septembre_2024.pdf Prédication, Marc 7, 1-23, par Nicolas BONNAL. Port-Royal 1er septembre 2024.pdf  (76.54 Ko)

Marc, 7, 1-23

 

LA LOI ET LA TRADITION. LE PUR ET L'IMPUR.
Prédication par Nicolas Bonnal

 

Une double antithèse nourrit ce long passage. 

 

Envisagé à ce prisme, il peut se condenser aisément : la tradition des anciens ne peut aller contre la loi de Moïse. Et la seule pureté ou impureté qui compte, c'est celle du cœur de l'homme. La synthèse peut être encore plus rapide : c'est le changement apporté dans le cœur de l'homme par le respect de la loi de Moïse qui le rend pur, et pas le respect servile de traditions alimentaires ou rituelles.

 

Tentons de donner chair à ce résumé lapidaire et réducteur. 

 

Tout part d'un mouvement. 

 

Celui des Pharisiens et de quelques scribes venus de Jérusalem, qui se rassemblent autour de Jésus. S'assembler, se rassembler, se réunir, le verbe grec utilisé par Marc est de la même racine que le substantif d'où est né le mot synagogue. D'ailleurs, au chapitre précédent, l'évangéliste aura recours à ce même verbe pour décrire le mouvement des disciples que Jésus avait envoyés en mission et qui reviennent, pour lui rapporter tout ce qu'ils avait fait et enseigné. Et dans les chapitres 4 et 5, ce même verbe décrit le mouvement des foules qui s'assemblent au tour de Jésus.

 

Ce rapprochement n'est pas usurpé. Il ne nous est pas dit que les Pharisiens et les scribes sont venus avec des intentions hostiles. Ils sont venus et se sont rassemblés autour de Jésus, comme le font des disciples. 

 

Mais c'est précisément le comportement de ceux-ci au cours d'un repas qui transforme ce mouvement en controverse. Les Pharisiens et les scribes constatent, en effet, que les disciples ne se sont pas lavés les mains avant de prendre ce repas. 

 

Ce repas des disciples, c'est le partage du pain, comme ils l'ont fait, à la demande de Jésus, avec la foule, des cinq pains qu'ils avaient avec eux. Notre récit suit pratiquement immédiatement cette multiplication des pains. On ne parle pas ici seulement de l'ingurgitation des calories nécessaires à la vie, mais de ce qu'est le repas dans le Nouveau Testament, l'essence même du partage fraternel.

 

Marc, qui s'adresse, peut-être depuis Rome, à un public non juif, prend grand soin d'expliquer à ses lecteurs que les Pharisiens ne relèvent pas, ainsi, un manque d'hygiène, tel que nous l'entendons, mais le non-respect de règles rituelles.

 

Il détaille les règles issues de la tradition des anciens que les Juifs en général et les Pharisiens en particulier respectent avant de manger. La tradition des anciens. Mais pas la loi de Moïse : en effet, l'Ancien testament (voir Exode 30, 17-21) n'impose de telles ablutions qu'aux prêtres avant d'offrir un sacrifice. 

 

D'ailleurs, le terme utilisé pour désigner le lavage rituel des coupes, des cruches et des plats, c'est le mot de baptême. 

 

C'est donc d'une affaire doublement sérieuse que nous parle Marc : se rendre pur pour participer à un partage fraternel du pain. 

 

Mais, cette obsession des Pharisiens est insupportable à Jésus, qui la dévoile pour ce qu'elle est. D'abord, parce qu'ils invoquent une règle purement formelle, de celles dénoncées par le passage du livre d'Esaïe que Jésus cite, qui oppose le mouvement des lèvres et le mouvement du cœur, et dénonce la vanité de paroles qui n'engagent pas. 

 

Mais il ne s'en tient pas là, et il constate que le respect de cette règle formelle, issue de la tradition des anciens, devient un prétexte pour ne pas respecter les commandements de Dieu, tels que Moïse les a transmis. 

 

Pour prendre un exemple particulièrement scandaleux d'une telle situation, il change complètement de registre, et loin de développer en quoi cette obsession des ablutions rituelles avant le partage du pain conduirait à ne pas respecter la loi de Moïse, il cite une règle issue de la tradition qui dispensait du devoir de secours envers ses parents ceux qui faisaient vœu de donner au temple les sommes correspondantes. 

 

Si le Pentateuque est très disert sur le « qorban » (au point que Jésus utilise le mot hébreu), l'offrande sacrée faite à Dieu, le plus souvent sous forme de sacrifice animal, à aucun moment la loi n'imagine le mécanisme hypocrite et rémunérateur que stigmatise Jésus. Hypocrite, parce qu'il dédouane à peu de frais des enfants dénués de toute affection pour leurs parents de subvenir à leurs besoins dans leurs vieux jours. Rémunérateur, pour le temple, qui fait de l'argent aux dépens de l'obligation la plus naturelle à l'espèce humaine. Un mécanisme que seul l'homme pouvait inventer.

 

Un usage, d'ailleurs, qui, semble-t-il, faisait à l'époque de Jésus, et bien légitimement, l'objet de nombreuses critiques.

 

Mais après ce détour caricatural, qui décrédibilise totalement les ablutions rituelles que respectent les Pharisiens, Jésus y revient, cette fois directement, frontalement, pour en dénoncer l'inutilité radicale. 

 

Pour ce faire, cessant de s'adresser aux seuls Pharisiens, il assemble la foule autour de lui. Et il attire très solennellement leur attention sur ce qu'il s'apprête à dire : « écoutez moi bien et comprenez », si solennellement que certains manuscrits ajoutent ici une phrase que Jésus utilise dans l'évangile lorsqu'il invite à méditer une parole qui ne se reçoit pas aisément, « Si quelqu'un a des oreilles pour entendre, qu'il entende ! ».

 

Cette déclaration solennelle est la suivante : « Il n'y a rien d'extérieur à l'homme qui puisse le rendre impur en pénétrant en lui ». Au contraire, c'est « ce qui sort de l'homme qui rend l'homme impur ».

 

Marc ne nous dit rien des réactions de la foule à cette déclaration. Mais il la qualifie de parabole. On peut s'interroger sur la pertinence d'une telle définition, qui semble ranger ce propos dans une catégorie qui ne lui convient pas de façon évidente. On y reviendra. 

 

Toujours est-il que les disciples n'ont pas compris le sens de son propos. Qu'il va donc leur répéter de façon plus développée, pour être le plus clair possible. 

 

Allant au-delà des seuls ablutions rituelles avant le repas, il l'élargit aux interdits alimentaires, et il réduit tout cela, de façon crue et directe, au fonctionnement du système digestif. 

 

Son affirmation est, à proprement parler, révolutionnaire pour les juifs pieux et observants, et ce encore de nos jours, si l'on songe au nombre des textes du Pentateuque qui les énumèrent de façon très précise, et à la façon dont ils façonnent le quotidien de beaucoup de nos contemporains. Il l'est pour toutes les religions qui accordent aux interdits alimentaires une importance capitale. 

 

Jésus sort donc les interdits alimentaires du champ du pur et de l'impur. Et au système digestif de l'homme, il oppose le cœur. A ce qui entre dans le système digestif de l'homme, il oppose ce qui sort du cœur de l'homme. 

 

C'est cela, pour lui, le seul critère du pur et de l'impur. 

 

Et ce faisant, il revient à sa première antithèse, qui revenait à écarter la tradition des anciens pour ne garder que la loi de Moïse : tous les comportements nés du cœur de l'homme qui le rendent impur sont bien ceux prohibés par le Décalogue.

 

Au terme de ce parcours, sommes-nous plus avancés, ou sommes-nous comme les disciples, qui ne comprennent pas tout ? 

 

Revenons au pur et à l'impur, selon le vocabulaire de Jésus. Qui est le vocabulaire de son temps, et qui reste largement, il faut bien le dire, le vocabulaire des religions. 

 

Ces deux catégories opposées structurent, par exemple, le Lévitique. Certains animaux terrestres, ceux qui ont le sabot fendu et qui ruminent, ou aquatiques, ceux qui ont des nageoires et des écailles, sont purs. Les autres sont impurs. Pour les oiseaux, c'est plus compliqué, et la définition est donnée en extension, et pas en compréhension. La femme accouchée, le lépreux, sont impurs, et la liste serait longue.

 

Est ainsi tracée une frontière, qui peut parfois être franchie, par l'accomplissement d'un rite de purification, mais qui est souvent intangible. Ainsi, s'il n'est pas guéri, le lépreux reste impur. Et rien ne pourra rendre pur un animal impur.

 

C'est cette frontière qui fait que les Pharisiens ne prendront point de repas avec les disciples. Et c'est cette frontière, qui posait tant de problèmes aux communautés qui rassemblaient autour de l'évangile de Juifs et des non-Juifs, que Jésus abolit. Il n'y a plus d'interdits alimentaires et le partage fraternel du pain par tous, quelle que soit son origine, devient possible. 

 

C'est un mur de séparation qui tombe. Comme le dit l'apôtre Paul, il n'y a plus ni homme ni femme, ni Juif ni Grec, ni homme libre, ni esclave.

 

Dans notre passage, Jésus, à proprement parler, abat les murs, abolit les discriminations, libère des préjugés et des hiérarchies. 

 

Dans le passage qui suit immédiatement le texte d'aujourd'hui, Jésus sera très directement confronté à cette disparition des frontières humaines. Une femme syro-phénicienne l'implorera de chasser un démon hors de sa fille. Et tout imprégné de l'importance de la frontière entre Juifs et non Juifs, il lui répondra assez vertement : « Laisse d'abord les enfants se rassasier, car ce n'est pas bien de prendre le pain des enfants pour le jeter aux petits chiens ». La femme, loin de souffrir, comme elle l'aurait pu, de cette comparaison humiliante pour elle, ne se démontera pas, et elle répliquera que « les petits chiens, sous la table, mangent les miettes des enfants ». Et Jésus cédera et accèdera à sa demande, parce que cette femme étrangère lui a permis de comprendre vraiment qu'il n'est pas venu seulement pour les « brebis perdues de la maison d'Israël », selon la justification de son refus, telle que la rapporte l'évangile selon Matthieu (15, 24).

 

Mais, après avoir aboli cette frontière humaine, en définissant un nouveau critère de la pureté, Jésus n'est-il pas en train de remplacer un mur par un autre ? 

 

De remplacer la fatalité de la différence, par l'insuffisance de nos mérites ?

 

Fatalité est le mot : dans le Lévitique, l'impur n'est pas coupable. Le bœuf n'est pas meilleur que le porc. La naissance que donne la femme accouchée est une bénédiction, mais la mère qu'elle vient de devenir est seulement momentanément impure, dans l'attente, au moment prévu, de l'accomplissement du rite de purification.

 

C'est ici qu'il faut se souvenir de l'étonnement marqué à la lecture du verset 17, qui définit comme une parabole le discours de Jésus. Une parabole n'est pas une allégorie. Il ne faut surtout pas, pour la comprendre, se contenter de remplacer un terme par un autre. Ce qui compte, dans une parabole, c'est le mouvement, la dynamique. Jamais la transposition terme à terme.

 

De fait, dans cette parabole du pur et de l'impur, et de ce qui entre dans la bouche et ce qui sort du cœur, un critère de pureté n'en remplace pas un autre, et la pureté ou l'impureté ne sont pas acquises selon ce qui sort du cœur, pas davantage qu'elles ne dépendent de ce qu'on mange ou ne mange pas. 

 

En d'autres termes, ce que nous faisons ou ne faisons pas ne nous rendra jamais purs ou impurs. Gardons-nous de recevoir cette parole de Jésus selon laquelle c'est ce qui sort du cœur de l'homme qui le rend impur comme un nouveau mur que le Christ bâtirait entre bons et méchants. 

 

L'évangile de Marc, quelques versets plus tard (10, 17-18), nous évite tout malentendu à cet égard. Au jeune homme riche, qui le salue en l'appelant « bon maître », il répliquera vertement : « pourquoi m'appelles-tu bon ? Nul n'est bon que Dieu seul ». Et comme pour illustrer cette affirmation, il demandera au jeune homme riche, qui a toujours dans son cœur respecté la loi de Moïse (l'énumération des grandes règles de celle-ci est exactement la même que celle que fait Jésus dans notre passage), de faire la seule chose qui lui coûterait tellement qu'il ne la fera pas, vendre tous ses biens et le suivre. 

 

Et si Jésus le met ainsi au défi, de telle sorte qu'il s'en va, « tout triste », c'est parce que, comme le rapporte Marc, il a regardé ce jeune homme et s'est pris à l'aimer. 

 

C'est bien que c'est l'amour inconditionnel de Dieu, cet amour qui dépasse toutes les frontières et qui seul peut nous mettre vraiment en mouvement vers les autres, quelles que soient les limites de notre cœur, qui est la seule source de la vraie pureté.

Amen.

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