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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

L'AMBIGUITÉ D'UNE LIESSE, CULTE DU 13 AVRIL 2025

Prédication par Robert Philipoussi



LE TEXTE DE LA PRÉDICATION

LA PRÉDICATION, par Robert Philipoussi 


NB: cette peinture est plutôt liée au texte de l'évangile de Matthieu, où il est indiqué deux ânes, la mère et son petit.
 

MARC  Chapitre 11
 

1 Alors qu'ils approchent de Jérusalem, vers Bethphagé et Béthanie, près du mont des Oliviers, il envoie deux de ses disciples 2 en leur disant : Allez au village qui est devant vous ; sitôt que vous y serez entrés, vous trouverez un ânon attaché, sur lequel aucun homme ne s'est encore assis ; détachez-le et amenez-le. 3Si quelqu'un vous dit : « Pourquoi faites-vous cela ? », répondez : « Le Seigneur en a besoin ; il le renverra ici tout de suite. »

4 Ils s'en allèrent et trouvèrent un ânon attaché dehors, près d'une porte, dans la rue ; ils le détachent. 5 Quelques-uns de ceux qui étaient là se mirent à leur dire : Qu'est-ce que vous faites ? Pourquoi détachez-vous l'ânon ? 6 Ils leur répondirent comme Jésus l'avait dit, et on les laissa aller.

7 Ils amènent à Jésus l'ânon, sur lequel ils lancent leurs vêtements ; il s'assit dessus. 8 Beaucoup de gens étendirent leurs vêtements sur le chemin, et d'autres des rameaux qu'ils avaient coupés dans la campagne. 9Ceux qui précédaient et ceux qui suivaient criaient :

Hosanna !

Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !

10 Béni soit le règne qui vient,

le règne de David, notre père !

Hosanna dans les lieux très hauts !

11 I l entra à Jérusalem, dans le temple. Quand il eut tout regardé, comme il était déjà tard, il sortit vers Béthanie avec les Douze.



 

PRÉDICATION

15 ans de ministère dans une paroisse. 15 prédications sur les récits emblématiques de Pâques, de Noël, de Pentecôte  et donc 15 Rameaux !

Mais une fois n'est pas coutume – et même deux fois, voire trois ne le sont pas moins: car aujourd'hui  en prologue, trois citations: 

« L'oubli est une grâce qui nous préserve de la souffrance infinie. »

— Marcel Proust, À la recherche du temps perdu : La Fugitive, 1925.
 

et aussi, la citation d'un ancien collègue :) , Confucius, 5e siècle avant Jésus-Christ
 

« Ce qui compte, ce n'est pas le nombre de fois où l'on tombe, mais le nombre de fois où l'on se relève. »

— Confucius, Entretiens (Lunyu),
 

Et enfin celle de quelqu'un qui a traîné ses guêtres d'étudiant pas loin de la Maison Fraternelle, lycée Henri IV, et ULM, issu du côté maternel de la famille Schweitzer, sa maman était la cousine d'Albert: 

« Recommencer est toujours une aventure. »  Les mots. Jean Paul Sartre
 

Cela étant dit,  voici le résumé des épisodes précédents. Certains sont à retrouver en intégralité quelque part sur notre site web.
 

Déjà un résumé de tous les bons commentaires sur ce texte. J'exagère, en suggérant qu'il pourrait y avoir des mauvais commentaires, mais  c'est qu'il n'est pas juste pas possible d'envisager ce texte uniquement sur les thèmes de la joie et de la victoire. 

 Très souvent la fête des Rameaux, quand elle ne tombe pas dans les vacances scolaires, devient une fête de paroisse, encouragée par de la prédication enthousiaste,  avec des enfants qui se sont procurés des branches qu'ils agitent .  J'ai moi-même une fois fait entrer un véritable âne dans un temple sur lequel était juché un enfant de l'école biblique.

Mais ces festivités, à l'occasion de cette fête, sont un peu inappropriées.
 

Voici pourquoi
 

Jésus entre à Jérusalem. Des foules l'acclament avec des rameaux. Elles voient en lui le sauveur qu'elles attendaient. Lui arrive enfin au sommet de la mission qu'ils s'était donnée que je peux traduire ainsi d'une formule plutôt personnelle : délivrer Dieu du Temple où il avait enfermé. Afin de  rendre ce Dieu au peuple, ce peuple qui souffre que les messages de Dieu qu'il reçoit ressemblent à des paroles d'un otage sous contrainte. Ce peuple qui souffre du légalisme, qui souffre du mépris des pauvres,  du manque de considération des enfants et des femmes, de l'imposition, des conséquences de l'application stricte des règles anciennes sur la séparation spatiale entre les purs et les impurs, 

qui  souffre de l'obligation des dépenses liées au sacrifices obligatoires du Temple, sans compter l'occupation ultra violente des Romains. Enfin il arrive , celui que ce peuple espérait. La rumeur autour de lui a gonflé. Ils sont venus. Ils acclament. Hosanna.

Qui veut dire « Sauve donc ! » ou « Sauve, je te prie ! »

Cette expression apparaît dans le Psaume 118:25, en hébreu :
 

« אנא יהוה הושיעה נא » (ana Adonaï hoshia-na)

« De grâce, Éternel, sauve-nous ! » «  ou sauve-nous maintenant ! »

 « Je t’en prie, Seigneur, sauve maintenant ! »
 

Pour continuer à citer ce Psaume avec les versets autour:

24 Voici le jour que le Seigneur a fait :

qu'il soit notre allégresse et notre joie !

25 S'il te plaît, Seigneur, accorde le salut !

S'il te plaît, Seigneur, accorde la victoire !

26 Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur  !

Depuis la maison du Seigneur, nous vous bénissons.

27 Le Seigneur (YHWH) est Dieu, il nous éclaire.

Attachez des branchages au cortège de fête,

jusqu'aux cornes de l'autel !

Mais voilà, tous les bons commentaires notent ce que tout le monde sait, mais qu'il faut redire: cette liesse, ce sentiment de victoire est en demi-teinte. Parce que celui qui entre à Jérusalem va être arrêté, sommairement instruit à charge, et condamné à mort.
 

La fête des rameaux, et tous les textes qui la racontent sont une forme littéraire forte qui présentent  une joie extrême, une sensation de victoire, un espoir éperdu, mais le tout sous un ciel noir qui apparaît au loin. Nous avons tous en tête, je pense, des références souvent cinématographiques de telles situations dramatiques. Quand des gens sont en fête, habillés de couleurs vives, souriants, mais tout à coup une musique contradictoire surgit, pour qu'à ce moment l'on ressente et comprenne que ce qui nous semblait une conclusion, voire un accomplissement, n'est que le début de la vraie histoire.
 

Voilà donc un résumé global de tout ce qui a pu être correctement dit sur ces passage
 

Maintenant, une idée originale, déjà énoncée ici-même, mais que je veux vous partager de nouveau, vous savez,  à cause de l'oubli.

C'est une proposition qui invite à ne pas lire forcément nos textes d'une façon linéaire. Je m'explique .
 

 Ici, même si elle n'est pas explicite, il y a une prophétie qui fait qu'on trouve dans ce texte un petit âne. Je vous la lis:
 

Livre de Zacharie 9, 9 :
 

« Sois transportée d’allégresse, fille de Sion !

Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem !

Voici que ton roi vient à toi ;

Il est juste et victorieux,

Il est humble et monté sur un âne,

Sur un ânon, le petit d’une ânesse. »
 

Le prophète Zacharie prophétise en un temps où le peuple juif vient de rentrer de Babylone à Jérusalem, suite à l’édit de Cyrus (roi perse, 538 av. J.-C.). Jérusalem est en ruines, le Temple est détruit, et la population est découragée face aux difficultés matérielles, sociales, et religieuses de la reconstruction.

Zacharie intervient dans ce contexte difficile, pour encourager les Juifs revenus d'exil à rebâtir le Temple de Jérusalem.
 

Ce qui fait sens, dans la temporalité de notre texte du jour. Certes, le Temple n'est pas encore re-détruit. Mais la référence à cette prophétie à ce moment-là pourrait évoquer qu'il est détruit de l'intérieur, par la caste des prêtres, accusé de corruption et aussi de collaboration.

Mais pourquoi je vous invite à ne pas uniquement lire tout cela d'une façon linéaire c'est-à-dire: « un prophète des temps anciens évoque un âne messianique, Jésus est juché sur un âne, entre à Jérusalem comme le Messie: la prophétie est accomplie dans sa pure logique pré-destinatrice ».

Non seulement parce que, on l'a dit, la victoire évoquée ici n'a pas eu lieu. C'est un fait.

Mais surtout parce que c'est probablement autrement que les choses se sont passées. Jésus connaissait sa Bible. Et il va utiliser cet âne pour dire quelque chose, escomptant que les gens reconnaissent par son action la prophétie.


 

Voir les choses d'une façon non linéaire, c'est dire: il y avait une prophétie venue des temps anciens, mais qui ne concernait évidemment pas Jésus, elle était destinée à l'encouragement d'un  peuple qui reconstituait ses bases.

Mais Jésus va s'approprier cette prophétie. Il va s'en saisir, et lui donner son sens pour ici et maintenant. C'est tout à fait différent de penser comme cela que de simplement dire: « prophétie puis accomplissement », sans qu'aucun des acteurs dans cette ligne n'ait aucune liberté.

Cette démarche n'est pas que respectueuse d'une pensée libre, elle est aussi provocatrice d'engagement pour chacun de nous.
 

Il y a des prophéties qui trainent comme des ondes paisibles circulant dans notre imaginaire. Elles ont été lancées il y a bien longtemps dans des contextes qui n'ont à peu près rien à voir avec nous. Et elles ne nous regardent pas, dans tous les sens de l'expression.

Alors, nous, ce que nous pouvons faire, et c'est ce qu'a fait Jésus, c'est qu'elles nous regardent. Saisissons-les, ces prophéties , faisons les nôtres, approprions-nous les. Maintenant elles sont à nous, même provisoirement, pour une action pour le bien commun de l'humanité. Nous pouvons les emprunter, comme Jésus a fait emprunter cet âne,  plutôt que d'attendre qu'elles se réalisent toutes seules comme par magie. Elles en sont incapables. Elles ne sont que des objets ondulants et imaginaires. Elles sont incapables de se réaliser toutes seules, si nous, nous ne les réalisons pas.
 

Et voici maintenant, la conclusion de cette prédication qui ne sera pas un bilan, mais une ouverture.
 

Dans ma première partie, j'évoquais l'incontestable ambiguïté de cette fête, et m'est revenue cette citation bien connue du livre du Deutéronome , chapitre 30 versets 15

« Vois, je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bon, la mort et le mauvais. »

ou mieux traduit encore :
 

« Vois, je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bonheur, la mort et le malheur. »

C'est en fait ce que j'entends  face à cet événement des Rameaux, mais je le crois profondément, ce devrait être l'écho de ce que nous pourrions entendre devant de nombreux événements de notre réelle existence . 
 

J'ai peut-être le choix ou en tous les cas, je dois absolument me demander si j'ai le choix. Ai-je le choix pour que cette victoire des Rameaux ne se transforme pas dans la catastrophe du vendredi saint ?

Liturgiquement, non, je n'ai pas le choix. Puisque tout est écrit, tout est codé, la liturgie chrétienne entière est fondée sur cette absence absolue de choix, sur cette prédestination.

Mais j'ose croire que Jésus pensait à ce moment-là aux deux possibilités de l'alternative, qu'il était conscient des risques majeurs qu'il prenait, mais aussi capable d'espérer contre toute attente. Je vois mal le Jésus que j'honore comme un simple pantin d'une prophétie pré écrite.

Puis-je inverser, par mon comportement, ma décision l'orientation de mon existence vers le bon, plutôt que de la laisser couler tranquillement vers le malheur annoncé?
 

Voilà ce que me dit cette histoire. Je suis exactement au moment où tout est en fait possible. Et prendre conscience de cela me réjouit. Je peux ré-écrire non pas la suite des événements en question, mais la suite non encore écrite de ma propre existence. Mais il fallait au moins que je le sache. C'est ce que ce texte m'enseigne en usant si ouvertement de l’ambiguïté.

Pour l'histoire sainte, cela n'a pas fonctionné, puisque Jésus était peut-être le seul à trouver cela possible, peut-être qu'il croyait à  ces gens qui l'acclament maintenant  mais qui en fait l'abandonneront rapidement après qu'il aura été arrêté.
 

Mais ce que nous ne savions pas encore, c'est que le sépulcre dans lequel on finira par le mettre était aussi un tombeau ambigu. Mais cette fois, qui sortira de son ambiguïté pour le bon et pour la vie
 

AMEN

 

17e s, École de Ch. Lebrun
17e s, École de Ch. Lebrun

TOUS LES TEXTES, AUDIO DU CULTE

culte_des_rameaux,_2025.mp3 Culte des Rameaux, 2025.mp3  (117.69 Mo)

MUSIQUE  
 

Mana Inagaki (violoncelle) + Emmanuel Mandrin (orgue) 
 

SALUTATION ANNONCE DE LA GRÂCE  Debout

Esaïe 43.16-21 

Ainsi parle le SEIGNEUR qui trace une route dans la mer et un sentier dans les eaux puissantes

Ne vous rappelez pas le passé et ne considérez plus ce qui est ancien. Je fais du nouveau dès maintenant cela germe ne le savez-vous pas ? Je mettrai un chemin dans le désert et des fleuves dans la terre aride.(...) je mets de l’eau dans le désert des fleuves dans la terre aride pour faire boire mon peuple.Debout

LOUANGE     

Notre coeur est joyeux de te savoir présent . Nous te bénissons de nous avoir donné ce jour pour nous célébrer.   Merci pour ton appel qui donne du  sens à notre existence  ; merci pour les frères et soeurs qui nous aident  ; merci pour ceux que tu invites auprès de nous; merci pour les liens que tu tisses et tout particulièrement pour la communion que tu suscites.  A l'Eternel nous rendons hommage car il est  pour toujours, 

notre Dieu, de génération en génération

 AMEN

35-13, p.486, les 4 strophes


 

CONFESSION DU PÉCHÉ  Assis

Notre Dieu, c’est ta présence que nous te demandons,  non seulement pour cet instant de prière mais pour toute notre vie.  En devenant humble, nous nous penchons vers Dieu. Celui qui nous connaît connaît aussi nos espoirs et nos faiblesses. Au moment de ta passion, nous est révélé que notre vie  est précieuse et nous nous engageons à la  respecter en respectant celle des autres.

61-01, p. 926 


 

Assis

DÉCLARATION DU PARDON 
 

Je vous le déclare, c'est la vérité - dit le Seigneur -

celui qui écoute mes paroles et qui croit en Celui qui m'a envoyé, a la vie éternelle. Il ne sera pas condamné, mais il est déjà passé de la mort à la vie(Jean 5/24)

Que tous ceux qui se convertissent dans la foi reçoivent en Jésus-Christ l'assurance de leur pardon.
 

Debout

61-01, p. 926 
 

VOLONTÉ DE DIEU (à dire ensemble)   

ESAÏE 50
 

4 Le Seigneur Dieu m’a donné

le langage des disciples,

pour que je sache soutenir par une parole

celui qui est épuisé ;

chaque matin, il éveille,

il éveille mon oreille,

pour que j’écoute

à la manière des disciples.

5 Le Seigneur Dieu m’a ouvert l’oreille,

et moi, je ne me suis pas rebellé

et je ne me suis pas dérobé
 

61-01, p. 926 
 

Assis

PRIÈRE D'ILLUMINATION  [LECTEUR] 

Nous prions  :

Que l’Esprit de Dieu éclaire les paroles que nous allons entendre ce matin, qu’elle devienne nourriture pour nos vies, et partage pour nos proches.
 

Assis


 

LECTURE [LECTEUR]  

MARC  Chapitre 11
 

1 Alors qu'ils approchent de Jérusalem, vers Bethphagé et Béthanie, près du mont des Oliviers, il envoie deux de ses disciples 2 en leur disant : Allez au village qui est devant vous ; sitôt que vous y serez entrés, vous trouverez un ânon attaché, sur lequel aucun homme ne s'est encore assis ; détachez-le et amenez-le. 3Si quelqu'un vous dit : « Pourquoi faites-vous cela ? », répondez : « Le Seigneur en a besoin ; il le renverra ici tout de suite. »

4 Ils s'en allèrent et trouvèrent un ânon attaché dehors, près d'une porte, dans la rue ; ils le détachent. 5 Quelques-uns de ceux qui étaient là se mirent à leur dire : Qu'est-ce que vous faites ? Pourquoi détachez-vous l'ânon ? 6 Ils leur répondirent comme Jésus l'avait dit, et on les laissa aller.

7 Ils amènent à Jésus l'ânon, sur lequel ils lancent leurs vêtements ; il s'assit dessus. 8 Beaucoup de gens étendirent leurs vêtements sur le chemin, et d'autres des rameaux qu'ils avaient coupés dans la campagne. 9Ceux qui précédaient et ceux qui suivaient criaient :

Hosanna !

Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !

10 Béni soit le règne qui vient,

le règne de David, notre père !

Hosanna dans les lieux très hauts !

11 I l entra à Jérusalem, dans le temple. Quand il eut tout regardé, comme il était déjà tard, il sortit vers Béthanie avec les Douze.
 

MUSIQUE 
 

PRÉDICATION, par Robert Philipoussi
 

15 ans de ministère dans une paroisse. 15 prédications sur les récits emblématiques de Pâques, de Noël, de Pentecôte  et donc 15 Rameaux !

Mais une fois n'est pas coutume – et même deux fois, voire trois ne le sont pas moins: car aujourd'hui  en prologue, trois citations: 

« L'oubli est une grâce qui nous préserve de la souffrance infinie. »

— Marcel Proust, À la recherche du temps perdu : La Fugitive, 1925.
 

et aussi, la citation d'un ancien collègue :) , Confucius, 5e siècle avant Jésus-Christ
 

« Ce qui compte, ce n'est pas le nombre de fois où l'on tombe, mais le nombre de fois où l'on se relève. »

— Confucius, Entretiens (Lunyu),
 

Et enfin celle de quelqu'un qui a traîné ses guêtres d'étudiant pas loin de la Maison Fraternelle, lycée Henri IV, et ULM, issu du côté maternel de la famille Schweitzer, sa maman était la cousine d'Albert: 

« Recommencer est toujours une aventure. »  Les mots. Jean Paul Sartre
 

Cela étant dit,  voici le résumé des épisodes précédents. Certains sont à retrouver en intégralité quelque part sur notre site web.
 

Déjà un résumé de tous les bons commentaires sur ce texte. J'exagère, en suggérant qu'il pourrait y avoir des mauvais commentaires, mais  c'est qu'il n'est pas juste pas possible d'envisager ce texte uniquement sur les thèmes de la joie et de la victoire. 

 Très souvent la fête des Rameaux, quand elle ne tombe pas dans les vacances scolaires, devient une fête de paroisse, encouragée par de la prédication enthousiaste,  avec des enfants qui se sont procurés des branches qu'ils agitent .  J'ai moi-même une fois fait entrer un véritable âne dans un temple sur lequel était juché un enfant de l'école biblique.

Mais ces festivités, à l'occasion de cette fête, sont un peu inappropriées.
 

Voici pourquoi
 

Jésus entre à Jérusalem. Des foules l'acclament avec des rameaux. Elles voient en lui le sauveur qu'elles attendaient. Lui arrive enfin au sommet de la mission qu'ils s'était donnée que je peux traduire ainsi d'une formule plutôt personnelle : délivrer Dieu du Temple où il avait enfermé. Afin de  rendre ce Dieu au peuple, ce peuple qui souffre que les messages de Dieu qu'il reçoit ressemblent à des paroles d'un otage sous contrainte. Ce peuple qui souffre du légalisme, qui souffre du mépris des pauvres,  du manque de considération des enfants et des femmes, de l'imposition, des conséquences de l'application stricte des règles anciennes sur la séparation spatiale entre les purs et les impurs, 

qui  souffre de l'obligation des dépenses liées au sacrifices obligatoires du Temple, sans compter l'occupation ultra violente des Romains. Enfin il arrive , celui que ce peuple espérait. La rumeur autour de lui a gonflé. Ils sont venus. Ils acclament. Hosanna.

Qui veut dire « Sauve donc ! » ou « Sauve, je te prie ! »

Cette expression apparaît dans le Psaume 118:25, en hébreu :
 

« אנא יהוה הושיעה נא » (ana Adonaï hoshia-na)

« De grâce, Éternel, sauve-nous ! » «  ou sauve-nous maintenant ! »

 « Je t’en prie, Seigneur, sauve maintenant ! »
 

Pour continuer à citer ce Psaume avec les versets autour:

24 Voici le jour que le Seigneur a fait :

qu'il soit notre allégresse et notre joie !

25 S'il te plaît, Seigneur, accorde le salut !

S'il te plaît, Seigneur, accorde la victoire !

26 Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur  !

Depuis la maison du Seigneur, nous vous bénissons.

27 Le Seigneur (YHWH) est Dieu, il nous éclaire.

Attachez des branchages au cortège de fête,

jusqu'aux cornes de l'autel !

Mais voilà, tous les bons commentaires notent ce que tout le monde sait, mais qu'il faut redire: cette liesse, ce sentiment de victoire est en demi-teinte. Parce que celui qui entre à Jérusalem va être arrêté, sommairement instruit à charge, et condamné à mort.
 

La fête des rameaux, et tous les textes qui la racontent sont une forme littéraire forte qui présentent  une joie extrême, une sensation de victoire, un espoir éperdu, mais le tout sous un ciel noir qui apparaît au loin. Nous avons tous en tête, je pense, des références souvent cinématographiques de telles situations dramatiques. Quand des gens sont en fête, habillés de couleurs vives, souriants, mais tout à coup une musique contradictoire surgit, pour qu'à ce moment l'on ressente et comprenne que ce qui nous semblait une conclusion, voire un accomplissement, n'est que le début de la vraie histoire.
 

Voilà donc un résumé global de tout ce qui a pu être correctement dit sur ces passage
 

Maintenant, une idée originale, déjà énoncée ici-même, mais que je veux vous partager de nouveau, vous savez,  à cause de l'oubli.

C'est une proposition qui invite à ne pas lire forcément nos textes d'une façon linéaire. Je m'explique .
 

 Ici, même si elle n'est pas explicite, il y a une prophétie qui fait qu'on trouve dans ce texte un petit âne. Je vous la lis:
 

Livre de Zacharie 9, 9 :
 

« Sois transportée d’allégresse, fille de Sion !

Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem !

Voici que ton roi vient à toi ;

Il est juste et victorieux,

Il est humble et monté sur un âne,

Sur un ânon, le petit d’une ânesse. »
 

Le prophète Zacharie prophétise en un temps où le peuple juif vient de rentrer de Babylone à Jérusalem, suite à l’édit de Cyrus (roi perse, 538 av. J.-C.). Jérusalem est en ruines, le Temple est détruit, et la population est découragée face aux difficultés matérielles, sociales, et religieuses de la reconstruction.

Zacharie intervient dans ce contexte difficile, pour encourager les Juifs revenus d'exil à rebâtir le Temple de Jérusalem.
 

Ce qui fait sens, dans la temporalité de notre texte du jour. Certes, le Temple n'est pas encore re-détruit. Mais la référence à cette prophétie à ce moment-là pourrait évoquer qu'il est détruit de l'intérieur, par la caste des prêtres, accusé de corruption et aussi de collaboration.

Mais pourquoi je vous invite à ne pas uniquement lire tout cela d'une façon linéaire c'est-à-dire: « un prophète des temps anciens évoque un âne messianique, Jésus est juché sur un âne, entre à Jérusalem comme le Messie: la prophétie est accomplie dans sa pure logique pré-destinatrice ».

Non seulement parce que, on l'a dit, la victoire évoquée ici n'a pas eu lieu. C'est un fait.

Mais surtout parce que c'est probablement autrement que les choses se sont passées. Jésus connaissait sa Bible. Et il va utiliser cet âne pour dire quelque chose, escomptant que les gens reconnaissent par son action la prophétie.


 

Voir les choses d'une façon non linéaire, c'est dire: il y avait une prophétie venue des temps anciens, mais qui ne concernait évidemment pas Jésus, elle était destinée à l'encouragement d'un  peuple qui reconstituait ses bases.

Mais Jésus va s'approprier cette prophétie. Il va s'en saisir, et lui donner son sens pour ici et maintenant. C'est tout à fait différent de penser comme cela que de simplement dire: « prophétie puis accomplissement », sans qu'aucun des acteurs dans cette ligne n'ait aucune liberté.

Cette démarche n'est pas que respectueuse d'une pensée libre, elle est aussi provocatrice d'engagement pour chacun de nous.
 

Il y a des prophéties qui trainent comme des ondes paisibles circulant dans notre imaginaire. Elles ont été lancées il y a bien longtemps dans des contextes qui n'ont à peu près rien à voir avec nous. Et elles ne nous regardent pas, dans tous les sens de l'expression.

Alors, nous, ce que nous pouvons faire, et c'est ce qu'a fait Jésus, c'est qu'elles nous regardent. Saisissons-les, ces prophéties , faisons les nôtres, approprions-nous les. Maintenant elles sont à nous, même provisoirement, pour une action pour le bien commun de l'humanité. Nous pouvons les emprunter, comme Jésus a fait emprunter cet âne,  plutôt que d'attendre qu'elles se réalisent toutes seules comme par magie. Elles en sont incapables. Elles ne sont que des objets ondulants et imaginaires. Elles sont incapables de se réaliser toutes seules, si nous, nous ne les réalisons pas.
 

Et voici maintenant, la conclusion de cette prédication qui ne sera pas un bilan, mais une ouverture.
 

Dans ma première partie, j'évoquais l'incontestable ambiguïté de cette fête, et m'est revenue cette citation bien connue du livre du Deutéronome , chapitre 30 versets 15

« Vois, je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bon, la mort et le mauvais. »

ou mieux traduit encore :
 

« Vois, je mets aujourd’hui devant toi la vie et le bonheur, la mort et le malheur. »

C'est en fait ce que j'entends  face à cet événement des Rameaux, mais je le crois profondément, ce devrait être l'écho de ce que nous pourrions entendre devant de nombreux événements de notre réelle existence . 
 

J'ai peut-être le choix ou en tous les cas, je dois absolument me demander si j'ai le choix. Ai-je le choix pour que cette victoire des Rameaux ne se transforme pas dans la catastrophe du vendredi saint ?

Liturgiquement, non, je n'ai pas le choix. Puisque tout est écrit, tout est codé, la liturgie chrétienne entière est fondée sur cette absence absolue de choix, sur cette prédestination.

Mais j'ose croire que Jésus pensait à ce moment-là aux deux possibilités de l'alternative, qu'il était conscient des risques majeurs qu'il prenait, mais aussi capable d'espérer contre toute attente. Je vois mal le Jésus que j'honore comme un simple pantin d'une prophétie pré écrite.

Puis-je inverser, par mon comportement, ma décision l'orientation de mon existence vers le bon, plutôt que de la laisser couler tranquillement vers le malheur annoncé?
 

Voilà ce que me dit cette histoire. Je suis exactement au moment où tout est en fait possible. Et prendre conscience de cela me réjouit. Je peux ré-écrire non pas la suite des événements en question, mais la suite non encore écrite de ma propre existence. Mais il fallait au moins que je le sache. C'est ce que ce texte m'enseigne en usant si ouvertement de l’ambiguïté.

Pour l'histoire sainte, cela n'a pas fonctionné, puisque Jésus était peut-être le seul à trouver cela possible, peut-être qu'il croyait à  ces gens qui l'acclament maintenant  mais qui en fait l'abandonneront rapidement après qu'il aura été arrêté.
 

Mais ce que nous ne savions pas encore, c'est que le sépulcre dans lequel on finira par le mettre était aussi un tombeau ambigu. Mais cette fois, qui sortira de son ambiguïté pour le bon et pour la vie
 

AMEN




 

 MUSIQUE 





 

debout

CONFESSION DE FOI  (à dire  ensemble)  

Éclairés et rassemblés par la Parole de Dieu, nous affirmons notre foi :

Pour le monde et pour moi, j’ai confiance en Jésus de Nazareth.                                                                                               Il est le seul sauveur et maître.

Il a été l’homme véritable                                                                                                                                               comme nul homme ne peut l’être par lui-même.                                                                                                                    Il est mort sur une croix pour les autres et pour le monde,                                                                                                                    comme pour moi.

Il est ressuscité,                                                                                                                                                                                     il est présent parmi les hommes                                                                                                                                                               et, pour les servir, il appelle son église                                                                                                                               sans tenir compte de nos distinctions.

Il agit par les hommes et les femmes dans l’histoire                                                                                                              pour l’amener à son but : un  univers réconcilié dans l’amour.

Aussi je ne crois à la fatalité,                                                                                                                                      ni de la guerre, ni de la haine,                                                                                                                                                                 ni de la catastrophe, ni de la mort,                                                                                                                             parce que je crois que Jésus nous libère pour des décisions libres.

Grâce à lui, Dieu a un visage,                                                                                                                                                        Il a un nom, celui de Père,                                                                                                                                                    Grâce à lui, ma vie a un sens,                                                                                                                                               l’univers aussi.

Pour le monde et pour moi,                                                                                                                                                    j’espère en Jésus de Nazareth. Il vient. 

Amen

Ps 138, page 154, toutes les str. (leste)

Parmi les annonces 

Ce dimanche à 18H au Temple  Concert des Musicales de Port Royal

Vendredi 18 avril  vendredi saint à St Jean  etc
 

62-41, page 982 (apprentissage)
 

Offrande

Que ce moment d'offrande soit béni et que l'évangile soit annoncé !




 

Assis
 

INTERCESSION   [LECTEUR] 

Eternel, notre Dieu, nous te prions pour qu’au sein de chaque religion, de chaque Eglise, de chaque communauté, les forces de discernement, de respect et d’accueil l’emportent sur les tentations du repli, de l’exclusion et de l’indifférence. Nous te prions pour ceux qui combattent pour le respect de la dignité humaine ; pour que grandisse en nous le désir de nous comprendre et de nous respecter.

Nous te prions pour ceux qui sont extérieurs à toute foi, peut-être déçus par l’attitude des croyants ; pour tous ceux pour lesquels le Ciel est vide, parce que rien ni personne ne vient rompre leur solitude ; pour tous ceux qui désespèrent de toi et des hommes parce que l’histoire répète sans cesse les mêmes tragédies 

Nous te prions pour que dans les bons comme dans les mauvais jours nous écoutions les pas du Christ invisible, qui chemine avec nous ; pour que ton Esprit donne sens à nos paroles et force à nos gestes, tout au long de notre marche sur la terre. Et ensemble nous te disons

• Notre Père…

(debout)

 EXHORTATION
 

Jésus a dit:   «  venez à moi vous tous qui êtes fatigués et je vous donnerai du repos"
 

BÉNÉDICTION

Le Seigneur de la paix vous donne lui-même la paix en tout temps, de toute manière. 
Le Seigneur est avec vous tous. 

MUSIQUE

 
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