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Les protestants des 13e et 5e arrondissements de Paris. Temple de Port Royal & Maison Fraternelle

" HEUREUX" «ΟΥΑΙ !», CULTE DU 16 FÉVRIER 2025

Prédication par le pasteur Robert Philipoussi



Textes du culte

fdc_16_fevrier_2025.pdf La feuille de culte.pdf  (591.09 Ko)
predication_du_16_fevrier_2025__1_.pdf Prédication du 16 février 2025 (1).pdf  (3.75 Mo)
r__extraits_culte_16_fevrier_2025.mp3 R. Extraits culte 16 février 2025.mp3  (108.8 Mo)

CONDUCTEUR DU CULTE DU 16 FÉVRIER 2025
 

ENTRÉE DES PERSONNES
 

MUSIQUE  (joyeux, frais)
 

LA SALUTATION

Merci au Seigneur de bienveillamment nous accueillir chez Lui, afin que nous nous sentions chez nous chez Lui.  Un culte n'est pas un simple meeting, il est en bonne ecclésiologie protestante la concrétisation d'une invitation du Seigneur à son peuple. L'invitation prend la forme d'un appel, adressé à des personnes, qui se découvrent donc assemblées, sans forcément préalablement se connaître, mais se rendant compte de la fraternité comme donné de départ. Cette assemblée issue d'un appel, encore une fois, en bonne ecclésiologie protestante, mais aussi en bonne étymologie, c'est l'ÉGLISE, et c'est aussi toute l'Église, qui ne se définit pas par son étendue, ou ses frontières institutionnelles, mais par le moment où elle existe, se représente, se présente devant Dieu, se charge de la bonne nouvelle avant de se disperser dans le monde, dans lequel les engagés singuliers ne seront pas plus isolés puisque désormais conscients qu'ils sont membres du peuple des enfants de Dieu.

Cette invitation chez le Seigneur commence donc par la salutation gracieuse de la part de l'hôte, que je vous retransmets  «  Soyez fraternellement accueillis, au nom du Seigneur »
 

Et l'assemblée, à ce moment là et avant de continuer le dialogue, avant toute chose, répond à cette salutation  par un merci, lequel dans le culte prend  le nom de « LOUANGE », que je vous invite à ce que nous la disions  ensemble, debout, à l'aide de notre feuille de culte. 
 

[DEBOUT]
 

LA LOUANGE [ENSEMBLE]
 

Toi qui es au-delà de nos mots et pourtant si proche de nos cœurs,

Nous Te louons car  Ta présence nous y autorise

Tu es Toi La lumière qui perce nos plus longues nuits
 

Nous Te célébrons, Toi qui as créé un monde si vaste, si complexe,

Un monde où la beauté côtoie la douleur
 

Tu n’es pas un Dieu lointain, sombre indifférent

Mais tu marches avec nous,

Dans les rues tumultueuses de nos villes,

Dans  notre solitude
 

Nous Te rendons grâce pour Ton amour qui ne se négocie pas

Un amour qui ne fait pas de promesses vagues,

Mais qui s’incarne dans la réalité 

Tu es là , dans les voix qui s’élèvent pour la justice, et aussi

Dans les gestes simples pour la  dignité
 

Ô Dieu, ressuscite en nous le courage que nous avons perdu.

Dans un monde où tout semble parfois s’effondrer,

Où les espoirs s’émiettent comme des châteaux de sable,

Souffle sur nous Ton Esprit de force 

Rappelle-nous que nous ne sommes pas seuls, qu'il y a nos frères et nos sœurs, et Toi

Qui es à l'oeuvre
 

Rends nous l'espérance concrète,

Qui croit que l’impossible peut advenir.

Donne-nous des yeux pour le voir, 

Des mains qui maintiennent, 

Des cœurs pour être téméraires
 

Nous Te louons, Dieu de la Vie,

Tu es Celui qui fait toutes choses nouvelles.

Dans nos épreuves, Tu es notre rocher,

Dans nos joies, notre cantique

Que notre louange ne soit pas seulement sur nos lèvres,

Mais dans nos choix et nos combats.  Amen
 

CHANT 41-28,  À Dieu soit la gloire, p.600, les deux strophes (rapide rythmé)
 

[ASSIS]

LA PRIÈRE DE CONVERSION

composée par R.Philipoussi
 

Je viens vers Toi Seigneur non pas pour t'implorer ou me plaindre de quoi que ce soit. Mais simplement en me rendant compte que le temps qui me manque dans mon existence est aussi le temps du manque de Toi.  Alors, oui, je me tiens en ta présence dans l'espoir explicite que tu viennes dans ce manque de temps, pour moi, pour les autres et pour Toi, et que tu m'aides à craquer ma conception si ignare du temps que j'ai, quand j'oublie sans cesse que c'est de ton éternité vibrante qu'il procède, laquelle se moque de toutes les petites boites dans lesquelles je tente sottement d'en isoler des fragments. Oui Seigneur, convertis mon temps et donne moi de ton Temps.
 

CHANT 37-13,  le temps s'échappe p.557, strophe 1 (méditatif, mais pas lent)
 

L'ANNONCE DU PARDON  [LECTEUR]
 

L’apôtre Paul déclare : « Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle création. Et ce qui est ancien est passé : il y a là du nouveau. Et tout vient de Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par le Christ, et qui nous a donné le ministère de la réconciliation. » (2 Corinthiens 5,17-18)

Cette promesse est pour nous, lorsque nous doutons sur notre chemin, lorsque nous nous sentons indignes, lorsque nous plions sous la routine ou la difficulté de la vie.

Cette nouvelle création n’est pas le fruit de nos repentirs ou de nos efforts, elle est l’œuvre du Seigneur crucifié et ressuscité, celui qui demeure chaque jour à nos côtés, quoiqu’il arrive, jusqu’à la fin des temps.

Que Dieu nous mette au cœur l’assurance de son pardon et qu’Il nous donne de marcher vers son Royaume.
 

[DEBOUT]
 

CHANT 37-13,  le temps s'échappe p.557, strophe 2


 

L'EXPRESSION DE LA VOLONTÉ DE DIEU [LECTEUR]
 

« Avec quoi me présenterai-je devant le SEIGNEUR ? Avec quoi m’inclinerai-je devant le Dieu d’en haut ? Me présenterai-je avec des holocaustes, avec des taurillons d’un an ? Le SEIGNEUR agréera-t-il des milliers de béliers, des dizaines de milliers de torrents d’huile ? Donnerai-je mon premier-né pour ma transgression, donnerai-je le fruit de mon ventre pour mon propre péché ?

« Il t’est fait connaître, ô humain, ce qui est bon ; et qu’est-ce que le SEIGNEUR réclame de toi, si ce n’est que tu agisses selon l’équité, que tu aimes la fidélité, et que tu marches modestement avec ton Dieu ? » (Michée 6,6-8)

CHANT 37-13,  le temps s'échappe p.557, strophe 3
 

[ASSIS]

LA PRIÈRE D'ILLUMINATION[LECTEUR]

Notre Dieu, Ta parole est vérité. 

Rends nous disponibles Et disposés Pour toi et pour autrui Par ta vérité.

Ta parole est vérité.

Par elle, rends-nous libres

Pour aimer

Et construire avec toi

Le monde où tu règnes.

Ta parole est vérité.

Donne-nous de l’entendre

Pour en vivre

Et pour oser en témoigner.

Amen ! 
 

LES  LECTURES [LECTEUR (S)]
 

1 COR. 15
 

12 Or si l'on proclame que le Christ s'est réveillé d'entre les morts, comment quelques-uns d'entre vous peuvent-ils dire qu'il n'y a pas de résurrection des morts ? 13 S'il n'y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus ne s'est pas réveillé. 14Et si le Christ ne s'est pas réveillé, alors notre proclamation est inutile, et votre foi aussi est inutile. 15Nous apparaissons même comme de faux témoins de Dieu, puisque nous avons témoigné contre Dieu qu'il a réveillé le Christ, alors qu'il ne l'a pas réveillé, s'il est vrai que les morts ne se réveillent pas. 16En effet, si les morts ne se réveillent pas, le Christ non plus ne s'est pas réveillé. 17 Et si le Christ ne s'est pas réveillé, votre foi est futile, vous êtes encore dans vos péchés 18et ceux qui se sont endormis dans le Christ sont perdus. 19Si c'est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espérance dans le Christ, nous sommes les plus pitoyables de tous.

20 Mais le Christ s'est bel et bien réveillé d'entre les morts : il est les prémices de ceux qui se sont endormis.


 

LUC 6

17 Il descendit avec eux et s'arrêta sur un endroit tout plat, où se trouvait une grande foule de ses disciples et une grande multitude du peuple de toute la Judée, de Jérusalem et du littoral de Tyr et de Sidon. 18 Ils étaient venus pour l'entendre et pour être guéris de leurs maladies. Ceux qui étaient perturbés par des esprits impurs étaient guéris. 19 Et toute la foule cherchait à le toucher, parce qu'une force sortait de lui et les guérissait tous.

20 Alors, levant les yeux sur ses disciples, il disait :

Heureux êtes-vous, vous les pauvres,

car le royaume de Dieu est à vous !

21 Heureux êtes-vous, vous qui avez faim maintenant,

car vous serez rassasiés !

Heureux êtes-vous, vous qui pleurez maintenant,

car vous rirez !

22 Heureux êtes-vous lorsque les gens vous détestent, lorsqu'ils vous excluent, vous insultent et rejettent votre nom comme infâme, à cause du Fils de l'homme.

23 Réjouissez-vous en ce jour-là et tressaillez de joie, parce que votre récompense est grande dans le ciel ; car c'est ainsi que leurs pères traitaient les prophètes.

24 Mais quel malheur pour vous, les riches !

Vous tenez votre consolation !

25 Quel malheur pour vous qui êtes rassasiés maintenant !

Vous aurez faim !

Quel malheur pour vous qui riez maintenant !

Vous serez dans le deuil et dans les larmes !

26 Quel malheur pour vous, lorsque tout le monde parle en bien de vous !

C'est ainsi que leurs pères traitaient les prophètes de mensonge !
 

LE TEXTE DE LA PRÉDICATION

Entrer dans un texte biblique, c'est un peu comme entrer dans un appartement que vous voulez acheter, parce que vous en avez vu le plan et la localisation, mais que vous visitez avec les actuels occupants encore dedans. Ce n'est pas tant les occupants qui vous ennuient mais c'est tout ce qu'ils ont fait comme arrangements. Tiens, ils ont installé une cloison pour séparer en deux la salle de séjour pour créer une chambre d'enfant, mais si bien que cela a réduit de moitié la vue et la luminosité, et embarrasse l'accès sur le balcon. Tiens, la circularité qui avait été sans doute prévue par l'architecte est empêchée, ce qui oblige toujours à rebrousser chemin. Etrange aussi quand même cet amoncellement de plantes vertes sur des étagères qui ont rendu le mur humide, malgré l'installation de lambris à visée décorative. Tiens, des tapis qui cachent un parquet sublime. Oh pourquoi avoir retiré les volets en bois pour les remplacer par du PVC de basse qualité. Oui, c'était plus cher de réparer, oui c'aurait été beaucoup de travail, et d'expertise. Dommage. Ah, en fait le plafond était plus haut, ce que je vois n'est en fait qu'un faux plafond. Pour éviter d'entendre le voisin du dessus, sans doute. Non, mais avec ces hauts plafonds, on arrivait pas à chauffer, ce n'était pas confortable. Oui mais du coup, c'est plus triste, et ça réduit encore plus la vue vers l'extérieur. Ça enferme.

Oui, un texte biblique est déjà occupé par les traditions d'interprétations qui se sont amoncelées dans une fantastique traversée des époques. Parmi ces interprétations qui collent désormais au texte, comme des parasites officiels, il y en a des savantes, des orientées politiquement, des simplistes, mais aussi, des plus fourbes, celles aussi qui ne sont que des automatismes d'idées reçues, et il y aussi les confusions, les mélanges, les synopses et tout cela débute bien sûr par des choix de traductions. Et c'est pour cela qu'on a parfois de la peine à se réjouir d'emblée d'un texte ou de la difficulté à ne serait -ce que le voir.

Le travail d'un prédicateur de la parole à partir d'un texte, est de tenter, un peu désespérément il est vrai, de le présenter , non pas dans son état originel, mais comme un espace plus facile à arpenter, plus évident, un endroit où il serait plus facile de s'imaginer y vivre. Présenter en fait le travail présumé- bien sûr- de l'architecte de départ.

Ici, on est servi. Déjà, il y a du mélange et de la confusion possible. En effet, il y a deux séries de béatitudes. Les nôtres ce matin dans Luc, et celles de Matthieu, beaucoup plus connues, où on y trouve dans un sermon sur une montagne, en fait une colline, le fameux «  heureux les pauvres en esprit » . C'est la traduction courante et connue. Mais c'est un fait que l'expression de Matthieu reste difficile à traduire: pauvres de cœur (mais de quoi parle t on quand on parle de cœur, selon les époques, le cœur est le siège de divers sentiments ou aptitudes) . Et disons-le: bien entendu que cela préserve subrepticement et habilement ceux qui bien que riches, savent rester « pauvres » de cœur.

Certains pour contrecarrer cette tendance à la justification du riche, traduisent- mais est ce encore une traduction? - par Heureux les humiliés du souffle. Ce qui est exact terme à terme, puisque le mot « pauvre » en grec désigne d'abord la posture du mendiant, le fait de se plier pour quémander, donc se tenant plus près du sol, donc près de l'humus, donc humble, donc humilié, et manquant de souffle, traduction interne au français du mot esprit. Mais quand on y regarde bien «  humiliés du souffle », c'est beau, mais ça ne veut pas dire grand-chose non plus.

Bref, ça c'est dans la version de l'évangile selon Matthieu. Mais celle-ci va contaminer dans les commentaires celle de Luc, ce qui fait que parfois nous n'arrivons pas à voir que Luc dit bien « heureux les pauvres » tout court. Non, pas en esprit, ou de cœur, pas spécialement essoufflés. Oui, Luc dit bien « les pauvres ». Oui mais!

Non non! Pas de tergiversation, sont bien désignés ici ceux qui n'ont pas d'argent suffisant pour vivre. Donc, non. Pas toi, ni moi.

Quoi ? Les béatitudes de Luc ne me concerneraient pas? Oui c'est à peu près l'idée. Mais c'est affreux! Oui, c'est pour cela que les gens en général retiennent spontanément la version de Matthieu.

Mais alors je me sens exclu! Tu te sens exclu ? Bien. Déjà, tu ressens ce que ressentent les pauvres, les vrais pauvres désignés par Jésus dans la version de Luc.

Est-ce encore un stratagème de Luc ? Un de ceux dont il est coutumier ? Je n'ai pas trop d'appui textuel pour l'affirmer, mais disons que j'aimerais à le penser, c'est son style, les chausse-trappes.

On a déjà fait un peu de ménage. Mais c'est encore loin d'être fini.

« Heureux ». Alors là, ce mot, c'est la fête des exégètes. Le seul problème c'est que souvent à la fin de leur explication, il n'y a rien de dit.

Prenons le mot français heureux. Déjà, personne ne sait vraiment ce que ça veut dire, et franchement tout le monde à mon sens a sa propre définition du bonheur, ou son propre avis, sa propre méthode sur comment être heureux. Certains en plus, ne sont pas préoccupés par cette recherche qu'ils trouvent d'avance vaine.

Certains pensent même que l'argent ne fait pas le bonheur, et les ultra riches se réjouissent, dit-on, d'avoir inventé ce proverbe.

En français, le bonheur est devenu vague, malgré tous les ouvrages de développement personnel 

qui lui sont consacrés. Alors qu'en français originel, le bonheur n'est pas une notion vague. Bon heur, bon augure, désignerait en fait le saisissement de l'occasion favorable; être heureux tout simplement consisterait à saisir sa chance. On disait autrefois, la vie est faite d'heur et de malheur.

Si on regarde le grec de Luc, on a le mot μακάριος (makarios), qu'on peut évidemment traduire par heureux, et s'arrêter là, ce qu'on fait, en général. Et on retombe dans le vague.

Mais si on essaie d'aller plus loin, on s'aperçoit que ce mot grec vient d'une racine qui désigne ce qui est grand (comme par exemple dans le mot méga, ou magnus); donc sans traduire réellement, on a quand même l'idée de grandeur, de largesse. Si Jésus avait parlé grec et que moi pauvre anonyme disciple dans la foule amassée sur cette plaine (oui chez Luc, le sermon est dans la plaine) , si je l'avais entendu, écouté, j'aurais saisi l'invitation d'être mis au large, j'aurais saisi l'invitation en fait de me déplier de ma posture sociale de mendiant et de me redresser à la hauteur de tout le monde.

Le souci, c'est que si Luc écrit en grec, il est peu probable que, même s'il devait parlait le grec commun, que dans ses sermons il utilise cette langue. Jésus parlait aussi probablement le latin, et sans doute aussi l'hébreu (sinon par exemple comment aurait il pu parler à la Samaritaine qui vivait dans une région où l'hébreu avait été réellement préservé). La thèse de Jésus parlant exclusivement araméen a depuis longtemps été contestée. Bref tout ça pour dire que s'il avait dit heureux en araméen, il aurait dit quelque chose comme «  Bon » dans le sens « vous êtes au bénéfice de la bonté de Dieu » et s'il avait dit ce mot en hébreu, cela serait venu du verbe אשר (ashar), qui signifie « avancer » . Donc moi pauvre dans l'audience de Jésus, si je l'avais entendu parler en grec, je me serais relevé, si je l'avais entendu parler en araméen, je me serais senti béni, ou mieux « bonifié » et si je l'avais entendu parler en hébreu, j'aurais quitté ma place de mendiant livré au bon vouloir des charitables, et je me serais mis «  en marche ». Gardez la monnaie, merci, au revoir. Je vais vraiment suivre Jésus et rejoindre sa troupe itinérante (qui selon Luc est composée de quelques 70 personnes, dont des femmes)

Tout ça pour dire, toujours dans cette perspective de vouloir s'installer dans un texte, après avoir fait un peu de ménage, il devient parfaitement impossible de considérer par exemple cette béatitude

« Heureux êtes-vous, vous les pauvres,car le royaume de Dieu est à vous ! » dans le sens de « souffrez maintenant car plus tard, quand vous serez morts, vous aurez le royaume ». Cette interprétation-là est la reine mère des parasites perfides des béatitudes.

Dans toutes les façons de traduire et d'aller chercher les racines de toutes les langues possibles, y compris dans la profondeur du mot français « heureux » (le fait de saisir sa chance) , il est simplement «  faux » de voir ici une invitation à la résignation et à la patience. Et pourtant, c'est comme cela que la tradition a repeint ce texte des Béatitudes, et que la pauvreté est devenue, entre autres, un destin méritoire. Etonnant, non ?

Je vous l'avais dit que cet appartement était bien, une fois débarrassé d'un certain fatras.

Mais ce n'est pas fini. Luc contrairement à Matthieu, plus centriste, apparemment, mentionnerait ce fameux « malheur aux riches » . Luc serait-il un révolutionnaire, et donc Jésus aussi ? Sans doute, peut-être, en tous les cas, le christianisme a été réellement un mouvement révolutionnaire dans le sens où il a quand même contribué à subvertir l'empire Romain (mais pour le transformer en un autre empire romain, au passage) .

Mais ici n'est pas la question, puisqu'en fait, Luc n'a pas exactement écrit «  Malheur aux riches ». Désolé de décevoir du monde peut-être. Ou de rassurer. Attention, on s'aventure dans le terrain délicat de la nuance. Ici, ce n'est pas en grec l'équivalent strict du mot « malheur à vous », c'est en fait tout simplement une interjection. Très jolie d'ailleurs en grec: « οὐαί » (ouai) Parfaitement intraduisible. Je dirais pour respecter la sonorité : alors vous les riches « ouch » , ou « alors vous les riches, oh la la, ou malheur aussi quand c'est employé à tout bout de champs dans certaines régions «  malheur, malheur ». Mais en tous les cas, ce n'est pas le parallèle antagoniste de « heureux ». Ici, c''est moins une malédiction qu'un rappel, qu'un avertissement, qu'une sorte de plainte, je dirais de gronderie pour ne pas dire engueulade, plus une menace qu'une constatation définitive. La Nouvelle Bible segond se débrouille bien finalement quand elle traduit ça, à condition de tenter d'y mettre le ton.

24 Mais quel malheur pour vous, les riches !

Vous tenez votre consolation !

25 Quel malheur pour vous qui êtes rassasiés maintenant !

Vous aurez faim !

Quel malheur pour vous qui riez maintenant !

Vous serez dans le deuil et dans les larmes !

« οὐαί » !

Pour conclure, ces béatitudes, n'ont rien de béat, ni de vraiment complexe. C'est simplement un véritable encouragement aux pauvres à se relever, à sortir de leur conditionnement qui les a recourbé, en leur affirmant qu'ils sont le peuple de la terre, les préférés du Seigneur, ici et maintenant, qu'ils sont les ferments du royaume.

Et si effectivement tu n'es pas pauvre, pas la peine de chercher en toi une espèce de pauvreté spirituelle ambiguë pour candidater, et te faufiler, tu n'es pas concerné par cet appel.

Que pourtant tu as entendu.

Stratagème littéraire évident. Message subliminal au riche: alors ça fait quoi de ne pas pouvoir te payer l'évangile.

Mais tu as aussi entendu cette adresse aux riches, souverainement explicite. Mais.Tu es riche ? Attends !

Ce n'est pas la peine de partir en courant pour fuir la malédiction de Jésus car, selon Luc, Jésus n'en profère aucune,  de malédiction. Reviens ! Écoute !

Il t'avertit simplement que ton choix de vie qui consiste à te concentrer exclusivement à ton idole réduit le champ de tes possibles. En gros, tu ne peux avoir le beurre et l'argent du beurre. Tu as créé toi-même ton royaume et tes sanctuaires, tu n'as donc besoin de rien d'autre. Ce n'est pas Dieu qui te maudit, tu t'es maudit toi-même, en refusant d'emblée toute possibilité d'avancer, et en ne choisissant que celle de grossir, toujours plus en honorant ton idole et ses prêtres.

Si les pauvres sont confortés et appelés à se redresser, ils ne sont pas invités à se convertir.

En revanche, les riches y sont ici assez brutalement poussés, ne serait-ce qu'en réaction à cette radicalité de l'avertissement.

C'est sans doute ceux-ci qui étaient les véritables destinataires de ce texte de Luc.

Les temps sont peut-être très propices aujourd'hui pour leur rappeler.

AMEN





 

MUSIQUE  (pas très long, mélodieux, rythmé, évolutif vers la sérénité)
 

[DEBOUT]

LA CONFESSION DE FOI [ENSEMBLE] [ENTRAINÉE PAR UN LECTEUR]
 

Je crois en Dieu,

Père, créateur du ciel et de la terre.

Il m’a façonné.e,

Je suis poussière et souffle
 

Je crois en Jésus-Christ,

Humain parmi les humains,

Mort sur une croix,

Ressuscité au matin.

Il a porté mes chaînes,

ouvert ma prison
 

Je crois en l’Esprit,

Feu qui ondule, vent qui entraîne

Il murmure à mon oreille,

guide mes pas
 

Je crois en l’Écriture,

Parole vivante

Elle éclaire ma nuit,
 

Je crois en l’Église,

Corps brisé, mais debout.

Nous marchons ensemble,

Pèlerins vers un seul royaume.

Je crois en la grâce,

Don gratuit, amour fou.

Je ne mérite rien,

Tout m’est offert
 

Je crois en la vie éternelle,

Promesse au-delà des tombeaux.

La mort n’a pas le dernier mot,

Christ est ma résurrection
 

Amen


 

CHANT 23-10, Nos coeurs pleins, p.277, les 3 strophes (joyeux)
 

LES ANNONCES

L'OFFRANDE ( EN MUSIQUE ADAPTÉE À LA DURÉE DE LA COLLECTE)


 

LA PRIÈRE D'INTERCESSION 

composée par R.Philipoussi
 

Avant de te prier Seigneur, je viens confesser ma faiblesse radicale à tenter de vouloir embrasser ou ne serait-ce que dire l'étendue de mon inquiétude que pourtant je ressens devant non seulement la violence avec laquelle l'humain se traite lui-même, enfermé qu'il est depuis la nuit des temps dans son imaginaire clos, mais aussi devant cette incapacité qu'il a de s'en sortir pour simplement regarder le réel véritable, infiniment moins torturé, moins infantile, et surtout tellement plus grand que lui, cet imaginaire qui pourtant me permet en assemblée de t'adresser ces mots, qui sont autant de sons avec l'espoir fou qu'ils crèvent ce plafond et brisent ces murs qui nous retranchent de ton règne.
 

Mais je veux aussi te dire merci, parce que c'est le seul mot que je trouve pertinent pour aller vers toi, un merci comme un « tant pis » , « tant pis » ,  j'ose te remercier de ta présence, malgré l'idiotie, la corruption, la mesquinerie et l'absence d'empathie devenue normes dans ce monde où j'habite avec mes frères et mes sœurs et où  ma prière témoigne à tout le moins que je refuse de m'y habituer.
 

Merci, pour les éclats de ton règne dans nos existences, à travers des sourires inattendus, des rencontres qui n'ont le sens que le plaisir d'être ensemble-vivants qu'elles procurent, des mots échangés qui sont juste gratuits, des mots qui ont oublié leur duplicité potentielle, des mots qui ont abandonné leurs pouvoirs d'être des armes, des mots qui préfèrent s'embarquer  dans la transmission de ta Parole qui est une bonne nouvelle, un évangile pour chacun de nous ici présent, des évangiles pour chacun et chacune de nous qui nous permettent de nous remettre un peu de la marche folle dans laquelle nous sommes aussi embarqués contre notre gré, des évangiles singuliers pour nous chacun et chacune, et aussi nous tous et toutes assemblé.e.s,  des évangiles nous permettant aussi de remettre sous ton regard ce que nous voulons te présenter Seigneur, des situations, ou des gens, que oui, voilà, nous te remettons dans un moment de silence apparent mais qui  devient le  creuset bruissant  et frémissant de notre prière
 

(…)


 

LE NOTRE PÈRE


 

RÉPÉTITION DES CHANTS POUR LA SEMAINE SUIVANTE

21-05 , jour du Seigneur, p.233, toutes les strophes (rapide rythmé) [ CONNU]

44-01, Louange à toi, p.654, les deux strophes (leste) [INCONNU]







 

L'EXHORTATION ET LA BÉNÉDICTION
 

  Veuillez recevoir cette exhortation d'après 1 Thessaloniciens 5

5 car vous êtes tous fils  et filles de la lumière et fils et filles du jour. Nous n'appartenons pas à la nuit ni aux ténèbres. 6 Ainsi donc, ne dormons pas comme les autres, mais veillons et restons calmes
 

Que le Seigneur vous bénisse et vous garde
 

AMEN
 

[ASSIS]
 

MUSIQUE (+ CONCERTANTE)
 

SORTIE DES PERSONNES

 

LE TEXTE DE LA PRÉDICATION EN ANGLAIS

Entering a biblical text is a bit like entering an apartment you want to buy because you’ve seen the floor plan and location, but you’re visiting it while the current occupants are still inside. It’s not so much the occupants that bother you, but rather all the modifications they’ve made. For instance, they’ve installed a partition to split the living room in two to create a child’s bedroom, but in doing so, they’ve halved the view and natural light, and made access to the balcony awkward. The circular flow that was likely intended by the architect is now blocked, forcing you to constantly backtrack. And then there’s the strange accumulation of potted plants on shelves that have made the wall damp, despite the decorative wood paneling they added. Oh, and the rugs hiding a stunning hardwood floor. Why did they remove the wooden shutters and replace them with low-quality PVC? Sure, repairing them would have been more expensive, and yes, it would have required a lot of work and expertise. What a shame. Oh, and the ceiling was actually higher—what I’m seeing is just a false ceiling. Probably to block out noise from the upstairs neighbor. But with those high ceilings, they couldn’t heat the place properly, so it wasn’t comfortable. True, but now it feels sadder and further restricts the view outside. It feels closed in.

Yes, a biblical text is already occupied by layers of interpretive traditions that have accumulated over centuries. Among these interpretations, which now cling to the text like official parasites, there are scholarly ones, politically motivated ones, simplistic ones, and even more insidious ones—those that are just automatic assumptions, as well as confusions, mixtures, and synopses. And all of this begins, of course, with translation choices. This is why it’s sometimes hard to immediately rejoice in a text or even to see it clearly.

The work of a preacher of the Word, starting from a text, is to try—somewhat desperately, it’s true—to present it not in its original state, but as a space that’s easier to navigate, more obvious, a place where it’s easier to imagine living. Essentially, to present the presumed work of the original architect.

Here, we’re in luck. There’s already some mixing and potential confusion. Indeed, there are two sets of Beatitudes. Ours this morning are from Luke, and then there are those from Matthew, which are much more well-known, where we find in a sermon on a mountain (actually a hill) the famous “Blessed are the poor in spirit.” That’s the common and familiar translation. But the fact is, Matthew’s expression remains difficult to translate: “poor in heart” (but what does “heart” mean? Depending on the era, the heart is the seat of various emotions or faculties). And let’s be honest: of course, this subtly and cleverly preserves those who, though rich, know how to remain “poor” in heart.

Some, to counter this tendency to justify the rich, translate—though is it still a translation?—as “Blessed are the humbled in breath.” This is exact, word for word, since the Greek word for “poor” first refers to the posture of a beggar, the act of bending down to beg, thus being closer to the ground, closer to the humus, thus humble, thus humiliated, and lacking breath—an internal French translation of the word “spirit.” But when you look closely, “humbled in breath” is beautiful, but it doesn’t mean much either.

Anyway, that’s in Matthew’s version. But this will contaminate the commentaries on Luke’s version, to the point where we sometimes fail to see that Luke simply says, “Blessed are the poor.” Period. Not “in spirit” or “in heart,” not particularly breathless. Yes, Luke says “the poor.” But wait!

No, no! No equivocation here—it clearly refers to those who don’t have enough money to live. So, no. Not you, nor me.

What? Luke’s Beatitudes don’t concern me? Yes, that’s pretty much the idea. But that’s awful! Yes, that’s why people generally prefer Matthew’s version.

But then I feel excluded! You feel excluded? Good. Now you’re feeling what the poor, the real poor designated by Jesus in Luke’s version, feel.

Is this another one of Luke’s stratagems? One of his usual tricks? I don’t have much textual evidence to support this, but I’d like to think so—it’s his style, the traps he sets.

We’ve already done some cleaning up. But we’re far from finished.

“Blessed.” Now, this word is a feast for exegetes. The only problem is that often, by the end of their explanations, nothing has been said.

Take the French word heureux (happy/blessed). Already, no one really knows what it means, and frankly, in my opinion, everyone has their own definition of happiness, or their own opinion, their own method on how to be happy. Some aren’t even concerned with this pursuit, which they find futile from the start.

Some even think that money doesn’t buy happiness, and the ultra-rich are said to rejoice at having invented this proverb.

In French, happiness has become vague, despite all the self-help books dedicated to it. Yet, in its original sense, happiness wasn’t a vague notion. Bonheur (happiness) comes from bon heur, meaning “good fortune” or “good omen,” and would simply mean seizing a favorable opportunity; being happy would simply mean seizing your chance. In the past, people said life is made of heur (good fortune) and malheur (misfortune).

If we look at the Greek in Luke, we have the word μακάριος (makarios), which can obviously be translated as “blessed” or “happy,” and we can stop there, as is usually done. And we fall back into vagueness.

But if we try to go further, we see that this Greek word comes from a root that means “great” (as in mega or magnus). So, without translating it directly, we still get the idea of greatness, of expansiveness. If Jesus had spoken Greek, and if I, a poor anonymous disciple in the crowd gathered on that plain (yes, in Luke, the sermon is on the plain), had heard Him, listened to Him, I would have grasped the invitation to be set at large, the invitation to unfold from my social posture as a beggar and stand upright at the height of everyone else.

The problem is that while Luke writes in Greek, it’s unlikely that Jesus, even if He spoke common Greek, used this language in His sermons. Jesus probably also spoke Latin and certainly Hebrew (otherwise, how could He have spoken to the Samaritan woman, who lived in a region where Hebrew had been preserved?). The theory that Jesus spoke exclusively Aramaic has long been contested. Anyway, all this to say that if He had said “blessed” in Aramaic, He would have said something like “good,” in the sense of “you are benefiting from God’s goodness,” and if He had said it in Hebrew, it would have come from the verb אשר (ashar), which means “to advance.” So, if I, a poor listener in Jesus’ audience, had heard Him speak in Greek, I would have stood up; if I had heard Him speak in Aramaic, I would have felt blessed, or better, “made good”; and if I had heard Him speak in Hebrew, I would have left my place as a beggar at the mercy of the charitable and “set out on the road.” Keep the change, thank you, goodbye. I’m really going to follow Jesus and join His itinerant group (which, according to Luke, consists of about 70 people, including women).

All this to say, still in the perspective of wanting to settle into a text, after doing some cleaning up, it becomes absolutely impossible to consider, for example, this Beatitude—“Blessed are you who are poor, for the kingdom of God is yours!”—in the sense of “suffer now, for later, when you’re dead, you’ll have the kingdom.” This interpretation is the queen mother of the insidious parasites of the Beatitudes.

In all the ways of translating and digging into the roots of all possible languages, including the depth of the French word heureux (seizing one’s chance), it is simply “wrong” to see here an invitation to resignation and patience. And yet, this is how tradition has repainted this text of the Beatitudes, and how poverty has become, among other things, a meritorious destiny. Surprising, isn’t it?

I told you this apartment was nice once you cleared away the clutter.

But we’re not done. Luke, unlike Matthew, who is more centrist, apparently,  mention the famous “woe to the rich.” Is Luke a revolutionary, and therefore Jesus too? Perhaps, maybe. In any case, Christianity was truly a revolutionary movement in the sense that it contributed to subverting the Roman Empire (though it transformed it into another Roman Empire in the process).

But that’s not the question here, because in fact, Luke didn’t exactly write “Woe to the rich.” Sorry to disappoint some, or to reassure others. We’re venturing into the delicate terrain of nuance. Here, it’s not the strict Greek equivalent of “woe to you”; it’s simply an interjection. A very beautiful one in Greek: οὐαί(ouai). Completely untranslatable. To respect the sound, I’d say: “So, you rich people, ouch,” or “So, you rich people, oh dear,” or “woe,” when it’s used constantly in certain regions, “woe, woe.” But in any case, it’s not the antagonistic parallel of “blessed.” Here, it’s less a curse than a reminder, a warning, a kind of complaint, I’d say a scolding, more a threat than a definitive statement. The New Segond Bible does a decent job translating it, as long as you try to capture the tone.

24 But woe to you who are rich,
for you have already received your comfort.
25 Woe to you who are well fed now,
for you will go hungry.
Woe to you who laugh now,
for you will mourn and weep.
οὐαί!

To conclude, these Beatitudes are neither blissful nor truly complex. They are simply a genuine encouragement to the poor to rise up, to break free from the conditioning that has bent them over, affirming that they are the people of the earth, the Lord’s favorites, here and now, and that they are the leaven of the kingdom.

And if you’re not poor, there’s no need to search within yourself for some ambiguous spiritual poverty to qualify or sneak in. You’re not the target of this call.

Yet, you’ve heard it.

An obvious literary stratagem. A subliminal message to the rich: So, how does it feel not to be able to afford the Gospel?

But you’ve also heard this address to the rich, which is supremely explicit. But wait! You’re rich? Hold on!

There’s no need to run away to escape Jesus’ curse because, according to Luke, Jesus doesn’t pronounce any curse. Come back! Listen!

He simply warns you that your choice of life, which consists of focusing exclusively on your idol, reduces your possibilities. In short, you can’t have your cake and eat it too. You’ve created your own kingdom and sanctuaries, so you don’t need anything else. It’s not God who curses you; you’ve cursed yourself by refusing from the outset any possibility of moving forward, choosing only to grow bigger, always honoring your idol and its priests.

If the poor are comforted and called to stand up, they are not invited to convert.

On the other hand, the rich are here rather brutally pushed to do so, if only in reaction to the radicality of the warning.

These are likely the true intended recipients of Luke’s text.

Perhaps today is a very fitting time to remind them.

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